Élection, dures leçons.
Mardi 24 avril 2007
Dimanche vers 17h, j’étais tout guilleret : à trois heures de la fermeture des bureaux de vote, à Villejuif, plusieurs avaient déjà dépassé les 80% de participation ! Et c’était pareil partout en France, l’abstention reculait massivement, les Français se ré-emparaient de la politique, c’était sûrement un référendum anti-Sarkozy. Patatras ! À l’heure des résultats, la gauche semble défaite, les Verts anéantis…. Bon, nuançons. SarkozyLa plus terrible nouvelle est bien sûr que Sarkozy est en passe de gagner son référendum. 31% dès le premier tour, un résultat sans précédent pour l’UMP depuis Pompidou en 1969 (et 32% pour l’UDF Giscard en 1974), soit un tiers de siècle ! Pire, la somme de tous les partis de droite (Front national, de Villiers, CPNT, UMP, UDF) avoisine les 65 %. Ségolène Royal atteint le chiffre de Mitterrand en 1981 : près de 26%… sauf qu’en 81, le PC était à 15%, les écolos à 4%, les Radicaux de Gauche et le PSU étaient là, etc. Le "vote utile" s’est révélé très "utile" : Ségolène est au deuxième tour, mais sur le papier, elle n’a aucun moyen de le gagner. Autrement dit, quand, en France, pratiquement tout le monde vote, ça donne une écrasante majorité (2/3) pour les partis de droite. En fait, c’était déjà la même chose en 2002. Je n’ai jamais cru à l’explication de l’échec de Jospin "par la dispersion". La dispersion en 2002 n’avait fait que révéler, dès le premier tour, la domination de la droite. En appelant pratiquement à supprimer le premier tour, le PS n’a obtenu qu’une seule chose : manger dès le premier tour ses réserves du second tour, ce que Mitterrand s’était bien gardé de faire. Lui "respectait ses partenaires"... pour mieux les étouffer après. Pourtant, le caractère anti-sarkoziste de la mobilisation était parfaitement clair dans certains quartiers. Devant certains bureaux de vote de Villejuif, de jeunes beurettes suppliaient les passants : « S’il-vous-plait, votez Ségolène, on ne veut pas de Sarkozy ». Oui mais voilà, dans d’autres quartiers de notre France déchirée, et même, au sein des quartiers populaires, parmi ceux qu’exaspèrent quelques voyous (une poignée, toujours les mêmes), le vote sarkoziste apparaissait comme un "plus" pour leur sécurité ! C’est incroyable, mais c’est ainsi. Pourtant, la vraie délinquance, celle qui touche les personnes, a augmenté sous Sarkozy. Elle est la conséquence directe de la suppression de la police de proximité et de l’aggravation de la déchirure sociale provoquée par la politique antisociale de Rafarin-Villepin (dont Sarko fut aussi ministre du budget). Je n’irai pas jusqu’à dire, comme Marianne, que « Sarkozy défend une politique de droite, c’est son droit, mais le problème c’est qu’il est fou ». Il est très probable qu’il ait en effet des problèmes relationnels, mais ce qui est effrayant, c’est bel et bien sa politique, et en particulier sa politique de sécurité, qui perd à être connue. Témoin, le grand « Face à nos lecteurs » du Parisien de l’avant veille du vote, le 20 avril, où tous les panélistes, sauf un, se sont déclarés effrayés par sa démagogie et sa personnalité. Je le cite : « La police de proximité, je l’ai maintenue à proximité des délinquants, et non pas à proximité des honnêtes gens… » Vous avez bien lu : la police n’est pas là pour protéger les honnêtes gens, mais pour camper à proximité des futurs délinquants. Or, comment reconnaître ces futurs délinquants ? Par la génétique, pardi ! Puisqu’il y a selon lui des gènes de la pédophilie, du suicide etc. Et qu’on peut dépister les futurs délinquants dès l’école maternelle... Exemple très concret : Jeanine, une de nos élues Villejuif-Autrement, sympathisante Verte, est le type même de la militante associative de quartier. Elle anime avec un dévouement inlassable l’association de son grand ensemble, toujours au service des co-locataires, donnant des cours de soutien scolaire, etc. Dans deux familles d’enfants auxquels elle apporte ce soutien scolaire, deux jeunes filles frayent avec des voyous d’une cité voisine, déjà connus pour leur propension à s’en prendre aux voitures... Elle en parle à leurs mères, qui ne font rien. Résultat : la veille du vote, à la nuit tombée, alors qu’elle sort, avec son mari et un petit enfant de sa voiture, ces jeunes attaquent et détruisent la voiture à coups de cailloux et de bouteille incendiaire. Hurlements. Toute la cité descend. Les mères des deux filles manquent de se faire lyncher… Il faut sans doute une sacrée dose de culture politique à Jeanine pour ne pas voter Sarkozy le lendemain. Pourtant, cet incident découle directement de la politique de police de Sarkozy, résumée dans la phrase que je viens de citer : la police n’est pas là pour protéger et rassurer les braves gens qui rentrent chez eux la nuit, mais aller provoquer la supposée "caillera". En donnant une réponse génétique et provocatrice à la crise de la famille et à la crise sociale que son gouvernement aggrave (les Brigades Anti Criminalité- cow-boys, les déploiements de CRS, les insultes à l’égard des populations des banlieues..), Sarkozy institue une ambiance de guerre civile, tout en maintenant ouvertement les braves gens en situation de danger. Seule une police de proximité, un encouragement aux associations et aux régies de quartier, des "médiateurs de nuit", permettraient de répondre à la crise de la parentalité, au fait que les mères ne peuvent pas tenir tous leurs enfants, au fait que les pères sont absents ou disparus, au sentiment (pas injustifié) qu’on ne peut rentrer tranquillement chez soi à la nuit tombée et qu’on a intérêt à s’écraser devant les bébés-caïds.… Sarkozy est donc un danger pour la France, non pas seulement à cause de son caractère machiste et bouillonnant, mais à cause des réponses politiques qu’il apporte aux problèmes de notre société. Et je ne parle même pas de ses projets délirants de réduction d’impôts et de couverture sociale qui, en quelques années, ramèneraient la France dans l’état où Thatcher a laissé la Grande Bretagne, de son soutien à la guerre de Bush, de son projet de mini-traité pour consolider le caractère intergouvernemental de l’Europe de Maastricht-Nice... Pour ma part, je voterai inconditionnellement pour Ségolène contre lui, comme j’aurais voté Bayrou contre lui, et comme j’ai voté Chirac contre Le Pen. N’oubliez pas de remonter à l’onglet suivant ! CentrismeSégolène Royal est à la fois la bénéficiaire et la victime de la propagande du PS depuis 5 ans : "Non à la dispersion ; ralliez vous tous à nous, on ne discute plus avec les petites orgas. Tous derrière le PS face au danger Sarkozy". Assurément, cette stratégie a permis la présence du PS au second tour. Elle risque en même temps de le condamner à la défaite, non seulement en le privant d’alliés de second tour, mais parce qu’elle a créé sur sa droite un concurrent qui peut toujours dire « Moi, je suis une encore meilleure protection contre la droitisation de la droite ». Et c’est là qu’apparaît la grande nouveauté (en France !) de cette campagne : la formation d’un vrai centrisme. Depuis que Lecanuet et Giscard d’Estaing ont unifié la droite non gaulliste, sous des dénominations successives l’UDF et l’UMP se partageaient la droite française, alternant à la présidence (en fait, seul Giscard d’Estaing y a représenté l’UDF) et se partageant les circonscriptions. Il était de plus en plus difficile, même pour le regretté René Rémond, de caractériser leurs différences (pro et anti européens, libéraux et bonapartistes), car peu à peu, les lignes de partage s’étaient brouillées. On était UDF ou UMP un peu par hasard. Mais les choses sont entrain de changer. D’abord, hélas, à cause du glissement à droite de la société française. Elle est largement due à l’érosion de l’hégémonie des idéaux socialistes et communistes sur la classe ouvrière, et à l’abandon dans lequel se sont retrouvés les ouvriers, à l’incapacité de la gauche (sauf de 1997 à 2000) à faire reculer le chômage. Elle est due plus largement à l’atomisation de la société et bien sûr à son vieillissement : dimanche on a voté majoritairement Ségolène jusqu’à 59 ans, au delà on vote à 40 % Sarkozy. Paradoxalement, la droitisation de la droite qui en résulté a ouvert un véritable espace au centre. Front national, UMP, UDF, c’est un parti de droite en trop. Une voie s’ouvrait pour la formation d’un véritable centre , c’est-à-dire un groupe capable de voter, comme ses électeurs, aussi bien avec la droite qu’avec la gauche. Cette voie s’est trouvée raffermie par l’européanisation de la vie politique, avec la formation du groupe ALDE au Parlement européen, qui regroupe les libéraux-démocrates britanniques, la Marguerite (parti de Romano Prodi) en Italie et... l’UDF pour la France. La Marguerite a recueilli l’aile "populaire" de l’ancienne démocratie chrétienne, et quelques écologistes comme Rutelli, qui ne pouvaient tout simplement pas supporter l’hégémonie de Berlusconi. Ce centre est majoritairement issu de la démocratie chrétienne, mais n’en a entraîné qu’une petite partie. Ce même jour où Bayrou fait sa percée en France, la Marguerite fusionnait avec les ex-communistes du PDS en Italie ! De fait, la pratique du gouvernement Prodi, allant de ce centre-gauche jusqu’à Rifundazione (plus à gauche que notre PCF) pour faire front à l’obscène dictature de l’argent, du populisme et de la vulgarité que représentait Berlusconi, a littéralement servi de laboratoire européen. L’UDF pourrait elle suivre cette voie ? Cela ne va absolument pas de soi : tous les députés UDF ont été élus en alliance avec l’UMP. Toutefois, l’UDF de Bayrou est la réunion de ceux qui n’avaient pas voulu rejoindre l’UMP en 2002, et qui donc tenaient à leurs différences vis à vis du système chiraquien. Mais ils avaient encore à choisir leur façon de se démarquer et, dans les premières années de l’actuelle mandature européenne, c’est par une série de votes plus à droite que l’UMP en matière économique que l’UDF s’est distinguée ! Et puis, je n’ai pas précisément décelé quand, mais sans doute au moment de l’entrée des nouveaux pays de l’Europe de l’Est (où les libéraux-démocrates représentent souvent la gauche face au populisme), l’ALDE a commencé à suivre les traces du laboratoire italien. L’obligation, pendant le référendum sur le TCE, de présenter « positivement » l’Europe, a obligé l’UDF et l’ALDE à gauchir leurs votes. Oh, pas bien loin ! Mais un craquement s’est fait sentir dans la majorité PPE-ALDE du Parlement européen. Autre signe avant-coureur : lors de la dernière élection en Italie, l’UDF s’est imposée dans un meeting de la gauche française en soutien à la coalition Prodi pour les électeurs italiens de Lorraine. Enfin, signal significatif, Valéry Giscard d’Estaing, le père fondateur, a choisi d’apporter son soutien non pas à Bayrou, mais à Sarkozy ! L’UDF avait cessé d’être un parti de droite comme les autres. Ultime coup de pouce, la campagne même du parti socialiste pour le "vote utile contre Sarkozy" offrait enfin à Bayrou la rampe de lancement qui lui manquait : « Eh bien moi, je suis le meilleur barrage contre Sarkozy ». Il semble bien que 40% au moins de son électorat de dimanche sont des électeurs habituels du parti socialiste, voire des écologistes, séduits par ce raisonnement du "vote utile". Nous nous trouvons donc potentiellement devant un renversement majeur de la carte politique de la France, avec la formation d’un vrai centre, plus nécessairement lié à la droite, et que la gauche comme les écologistes doivent essayer de rallier à leurs causes. Cela n’a rien de facile, car encore une fois, les institutions de la Cinquième République, et en particulier la domination du scrutin majoritaire, ont jusqu’à présent soudé l’UDF à la droite. Ce centre qui se voudrait autonome a donc au moins un point de convergence totale avec les écologistes : le passage à une VIè République, avec une forte dose de repésentation proportionnelle… ce que, malgré les promesses, les Verts n’ont jamais pu obtenir du Parti socialiste. N’oubliez pas de remonter à l’onglet suivant ! Les VertsL’apparition de ce nouveau centre était pain béni pour les écologistes partisans du ni droite ni gauche ou de l’alliance à droite : Antoine Waechter et Corinne Lepage, qui rallièrent Bayrou dès qu’il fut constaté qu’ils n’avaient aucune légitimité (du moins auprès des maires !) à représenter l’écologie. Très grave erreur : ce n’est pas parce que le centre oscille entre la droite et la gauche qu’il en devient nécessairement plus écologiste ! On pourrait presque dire « au contraire ». Mais en tout cas ce centre, parce qu’il a besoin d’exister, a tout intérêt à en rajouter sur les thématiques écologistes laissées en friche par les deux grands partis, socialiste et UMP. La notation par l’Alliance pour la Planète des programmes des candidats montre pourtant que cet apport de sang écologiste à l’UDF est peu perceptible : le programme de l’UDF reste moins écologiste que celui de Royal, Besancenot, Bové, sans parler de Voynet. Les Verts, quant à eux, ont choisi, et ils ont eu raison stratégiqument, de rester autonomes. Mais, dans la polarisation de dimanche, le prix à payer a été terrible. Ignorés par le parti socialiste qui comptait sur le vote utile pour les écraser définitivement, ils ont rencontré un important courant de sympathie auprès des associations qui, nombreuses, ont classé leur programme en tête de leurs préférences, mais ils ont été délaissés par leurs électeurs. L’ampleur de la défaite nous renvoie à 1986, et pratiquement pour les mêmes raisons : la panique des sympathisants de gauche face à l’irrésistible poussée de la droite. Dominique a sans doute fait la meilleure campagne propositionnelle que les Verts aient jamais faite, elle a recueilli partout la sympathie, mais cette sympathie ne s’est pas concrétisée. D’autant que sa campagne fut handicapée par les torpilles incessantes tirées de son propre camp, en faveur de Hulot, de Bové, de Ségolène, de Bayrou... Torpilles qu’elle esquiva avec le sourire et le ferme soutien de l’écrasante majorité de son parti. Pourtant, aux européennes, comme aux régionales de 2004, comme encore à la municipale de Bordeaux il y a quelques mois, la règle s’était établie : dans une élection à la proportionnelle, les écologistes pèsent environ 10%. Il semble se dessiner une autre règle terrifiante : dans un scrutin majoritaire, les écologistes ne pèsent rien (sauf aux cantonales, parce que tout le monde s’en fiche - à tort). Et il semble que ce soit le cas de tous les "petits candidats ", ceux qui servaient à donner un "signal d’inflexion" au premier tour. Ainsi, 2/3 des électeurs de Mamère de 2002, mais aussi 40% de ceux de Laguiller 2002 et même 45% de ceux de Besancenot ont voté "utile", dans la proportion de 2/3 pour Royal, 1/3 pour Bayrou dans les trois cas (sondage SDU IPSOS). Si donc Besancenot maintient son score (et il est le seul) c’est en trouvant une moitié de nouveaux électeurs. Dans la course des nains, Olivier Besancenot seul émerge. Il a littéralement pompé toutes les voix troskistes, y compris celles d’Arlette Laguiller, et le peu qui restait au PCF (qui s’effondre jusque dans ses derniers bastions de la Ceinture Rouge). Il a fait une excellente campagne, son texte de profession de foi était agréable à lire, à la fois programmatique, concret et personnel. Mais voilà, ce programme d’un anti-réformiste qui ne croit plus vraiment à la révolution ne sert, politiquement, strictement à rien : c’est un mélange de bons mots et d’objectifs syndicaux maximalistes. La LCR, contrairement à son père spirituel, Ernest Mandel, n’a plus de théorie du changement social, et ne prononce plus qu’un discours protestataire, syndicaliste radical. Il y a place pour un tel vote protestataire, pour ceux qui ne croient plus, ou pas encore, à la possibilité de changement par les institutions. Dès que ce vote pourrait être utile, en expédiant des élus dans les institutions, c’est-à-dire aux élections à la proportionnelle (municipales, régionales et européennes), ce vote LCR s’effondre, et réapparait alors le vote écologiste : un vote pour des militants qui veulent bien se salir les mains, parce que chaque minute compte pour sauver la planète. Un mot encore sur le plus grand perdant de cette élection : José Bové. Voilà un homme qui, il y a encore deux ou trois ans, incarnait une sorte de consensus national astérixien contre la malbouffe et les OGM, pour la défense d’un certain art de vie à la française et en même temps d’un vrai internationalisme, bref, un parfait candidat pour l’écologie politique. Je n’ai toujours pas compris qui a pu lui conseiller de se présenter, au moment où il l’a fait, et dans les conditions dans lesquelles il l’a fait. J’avais alors écrit que non seulement il se jospinisait (en répudiant sa promesse de ne pas se présenter contre Buffet et Besancenot), mais qu’en plus il se juquinisait, c’est-à-dire qu’il transformerait en un score ridicule sa bonne réputation et l’intérêt qu’il suscitait jusque là. Sa déroute est presque encore plus grave que celle des Verts (qui ne sont qu’un parti, et savent qu’ils continueront à exister dans toutes les élections à la proportionnelle), car c’est un mouvement social qui semble anéanti avec son score. Elle conclut de façon particulièrement dramatique la soi-disant dynamique du Non, confirmant avec lui la défaite de la Confédération paysanne, et peut-être même celle de la lutte contre les OGM. À quoi aura servi la candidature Bové ? À empêcher Besancenot de franchir les 5% et à faire repasser la candidate du PCF devant celle des Verts. C’était sans doute le but poursuivi par les mystérieux conseillers... Nous avons perdu une figure emblématique, mais le combat continue pour la bonne bouffe, l’agriculture paysanne et contre les OGM ! Il faudra, ce printemps, rester solidaire de José. Au contraire, Nicolas Hulot, qui aurait sans doute connu un sort aussi lamentable, a eu la grande sagesse de garder intacts son image et son rôle associativiste-fédérateur. Ce qui, nous le verrons, ne fut pas sans poser d’autres problèmes. Mais ne cherchons pas à nous consoler avec les malheurs de José. Le score injuste de Dominique Voynet est une catastrophe, car tous les combats qu’elle a menés au nom des Verts dans cette campagne, contre l’EPR, les OGM en pleins champs, etc, semblent ipso facto perdus. Ce n’est peut-être pas tout à fait le cas, mais il est clair que les associations, de l’Alliance pour la Planète jusqu’à celles pour les logiciels libres (la FFII), en passant par la Ligue de Droits de l’Homme ou les associations tiers-mondistes (Agir ici), qui lui avaient donné la meilleure note, ont perdu, avec ce score minuscule, un haut parleur pour leur exigences qui pourront être ignorées par les "grands candidats". La défaite de Verts est donc aussi la défaite des associations. Les torts sont sans doute partagés. Tenues par des traditions peut-être obsolètes, la plupart des associations n’ont pas osé dire clairement que, si on voulait faire avancer leur cause, il fallait le manifester au niveau électoral et donc voter pour la candidate la mieux notée. Le plus caricatural, de ce point de vue, fut Nicolas Hulot qui, après avoir dépolitisé la question écologique en faisant signer son pacte par tout le monde (y compris par celui dont il savait pertinemment qu’il n’en pensait pas un mot), a interminablement tergiversé avant de concéder avec des pincettes une petite "reprise de presse" sur la profession de foi de la candidate des Verts. Seul Alain Bougrain-Dubourg a osé afficher clairement ses convictions sur la profession de foi de Dominique. Qu’il soit ici remercié, comme les portes paroles de France Nature Environnement, et de la Confédération Paysanne qui se sont affichés avec elle à la Mutualité Mais la responsabilité des Verts est tout aussi grande. Depuis 4 ans, leur ligne officielle était la co-élaboration avec les associations "d’objectifs incontournables", de mesures-phares structurant la double campagne de 2007, pour construire un rapport de force dans les négociations avec leurs partenaires politiques. Mais si, de 2003 à 2004, cette ligne a été appliquée de façon consciente et habile avec la multiplication des Conventions publiques Vertes et des Trois heures pour l’écologie, elle fut de fait abandonnée après l’AG de Reims de décembre 2004. D’une certaine façon, la campagne de Dominique Voynet a renoué en catastrophe, mais de façon intense, ces liens avec les associations qui s’étaient distendus. Celles-ci ont effectivement renvoyé l’ascenseur en la notant comme leur meilleure correspondante politique. Mais il était sans doute trop tard, et en tout cas, ces associations n’ont visiblement pas pu faire le travail d’informer leurs adhérents et sympathisants de cette excellente notation. Ségolène peut-elle encore refaire son retard ? Rien ne l’indique dans les sondages sortis des urnes. Certes, une bonne partie du lepénisme à la « droite de la droite » a déjà rejoint Sarkozy, et les 10% qui « restent » à Le Pen (chiffre qui paraissait épouvantable il y a 20 ans…), et qui sont souvent des ouvriers désespérés, sont loin d’être tous acquis à l’ancien maire de Neuilly. Certes, les électeurs socialistes (et écologistes) qui se sont portés sur Bayrou comme étant le seul vote utile contre Sarkozy, vont rentrer au bercail. Le problème, c’est qu’ils pèsent environ 40% du vote Bayrou, alors que Ségolène ne peut gagner que si elle obtient au moins 60 à 70% de ce vote. Et cela tout en ralliant la quasi-totalité des votes Verts et "anti-libéraux", et en attirant les gaucho-lepénistes. La quadrature du cercle… Eh bien, cette quadrature du cercle a exactement autant de chances de se concrétiser que Prodi en avait de battre Berlusconi, et il l’a fait. De peu, mais il l’a fait. Qu’est ce qui peut plaire à la fois à l’électeur de Bayrou, à l’électeur anti-patrons de Besancenot, à l’électeur anti-bourgeois de Le Pen ? Trois choses au moins, qui devraient être l’essentiel du discours de Ségolène : 1 - Un discours de protection. Protection contre les risques sociaux et protection contre les risques environnementaux, non pas dans la fermeture au monde mais dans le redéploiement, organisé par l’État, de la communauté-providence. 2- Une forte dose d’écologie. Nous avons voté, en ce mois d’avril, sous un soleil de juin : le changement climatique, la montée des cancers et de l’asthme, les risques de la prolifération nucléaire sont aujourd’hui dans toutes les têtes et dans toutes les pages des journaux. 3 – La VIe République, un État impartial, permettant en même temps à l’écologie et au centre d’exister politiquement, grâce à une forte dose de proportionnelle. 4 – La relance d’une Europe fédérale à travers un nouveau texte constitutionnel à adopter par référendum. Ce point est essentiel pour rallier à la fois les fédéralistes convaincus que sont les écologistes et les centristes, tout en donnant des gages aux nonistes de bonne volonté qui se trouvent souvent dans l’électorat de Besancenot, sont prêts à rediscuter d’un autre texte, plus explicitement social, à condition qu’il soit soumis à référendum : contrairement au projet de Sarkozy, qui est de négocier un mini-traité en conférence intergouvernementale et de le faire adopter par les parlements. Sur l’ensemble de ces quatre points, nous savons que, malgré toute sa démagogie, Sarkozy ne pourra pas aller bien loin. C’est à Ségolène d’avoir l’audace de les porter, en commençant par réaliser au moins l’alliance de la gauche et des écologistes, alors que jusqu’ici le PS n’a su rassembler que la gauche du Programme Commun de 1973.
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