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par Alain Lipietz | 1er février 2001

Lettre du Forum Alternatives Européennes, n°18
Réguler la mondialisation, utopie ou perspective réelle ?
Réponse à trois questions sur la mondialisation.

1. Que peut-on entendre par la mondialisation ?
Concerne-t-elle tous les secteurs ? Quelles sont les voies de son emprise ?

La mondialisation est consubstantielle à l’existence et à l’histoire de l’humanité. L’Homo sapiens sapiens a éliminé les Néanderthaliens ; les Blancs, les Européens ont envahi l’Amérique et imposé le commerce triangulaire avec l’Afrique : tous ces mouvements se sont accompagnés d’un cortège de violences bien plus horribles que celles que l’on connaît aujourd’hui. La vague de la mondialisation ultralibérale du XXème siècle a été précédée par la première division internationale du travail, où le Sud produisait des matières premières, le Nord des produits manufacturés et de l’ingéniérie intellectuelle. Cette division internationale du travail a été remise en cause à la fin de ce siècle, à partir du moment où il est devenu possible de produire presque n’importe où n’importe quel produit manufacturé.

A la différence près que les travailleurs du Nord avaient réussi, depuis le XIXème siècle, à consolider des acquis sociaux, tandis que le Sud s’offre actuellement aux firmes transnationales comme un gisement de travail à bas salaires, ignorant des normes environnementales, ce qui reste la condition de son insertion dans la mondialisation, son " avantage comparatif ". Evidemment, ce n’est pas la même chose dans toutes les branches. Dans le domaine des biotechnologies, si la fabrique des gènes reste au Nord, la biodiversité est au Sud : on reste dans la " première division internationale du travail ".

Mais en industrie électronique, beaucoup de pays du Sud peuvent devenir des exportateurs redoutables, et même remonter l’échelle des qualifications et des salaires (voyez Singapour ou la Finlande).

2. Vouloir la réguler a-t-il un sens, ou est-ce utopique ?

Un des mots d’ordre du Forum de Porto Alegre était : " Un autre monde est possible ". Le vers de Paul Eluard, c’était : " Un autre monde est possible, mais il est dans celui-ci ", il ne faut pas l’oublier ! Face à la mondialisation néo-libérale, deux stratégies s’opposent : une stratégie " souverainiste ", qui rêve en quelque sorte de sortir de ce monde, qui fait du cadre national une forteresse des normes sociales, et une stratégie, qui est celle des organisations non gouvernementales qu’on a vues de Seattle à La Haye, du type Réseau action climat, ATTAC ou d’autres, qui travaillent à faire subordonner la mondialisation économique et financière à des normes et des lois internationales, comme celles de l’Organisation internationale du travail ou les obligations environnementales définies à Rio en 1992, par exemple.

Ce qui rejoint le vieux combat des travailleurs : que les législations sociales et environnementales prévalent sur le même espace géographique que celui du capital. Bref, si l’économie est devenue mondiale, alors il faut que la législation sociale et environnementale devienne mondiale, sans quoi les travailleurs et les régions de production resteront opposés les uns aux autres. Qu’un jour ces réglementations s’imposent au monde entier, c’est un des combats menés par les Verts.

Évidemment, tout ceci ne se fera pas en un jour !

3. L’Europe a-t-elle un rôle à jouer et le peut-elle ?

L’Union européenne a un double rôle. Un rôle de laboratoire institutionnel, puisque l’Europe, faut-il le rappeler, est la première zone de transnationalisation économique qui se voit peu à peu dotée d’une superstructure politique encore très peu démocratique.

Et un rôle de laboratoire normatif, puisque l’Europe est héritière des traditions de contrôle social et environnemental de l’économie propre aux nations qui la composent et qui restent les plus avancées au monde.

Reste à savoir si les classes dominantes vont parvenir à utiliser le retard de l’Europe politique : vont-elle encore et toujours chercher à imposer la mondialisation comme alibi de dérégulation, ou vont-elle se soumettre au primat politique d’édification de normes protectrices des droits sociaux et environnementaux ?




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