À trois jours de l’élection, nous avons le dernier sondage sérieux, celui d’Ipsos du 3-4 avril sur 12 000 personnes (à ne pas confondre avec leurs sondages 8 fois plus petits en revolving). Je crois en la valeur de ce sondage, en insistant sur le fait qu’il est un bon sondage à la date T, et pas une prévision pour le jour J. Même Ipsos, aux européennes 2019, dans son dernier sondage (le plus proche du résultat final parmi tous les sondeurs), s’était trompé de moitié sur les résultats des « moyens candidats » (par exemple 9,5% pour la liste Jadot au lieu de 13,5% résultat final ; effondrement des votes LFI et LR). Il en est ainsi du fait de la date de plus en plus tardive de la « cristallisation » du choix de voter et du choix de vote, que confirme d’ailleurs le présent sondage. Mais il dit quand même quelque chose sur les tendances.

1. Trois candidats ont réussi à convaincre qu’ils étaient LE « vote utile » dans leur proprebassin d’attraction (gauche, droite, extrême-droite), même s’ils ne convainquent pas forcément sur leurs programmes et prises de position. Ce mouvement s’est assez logiquement précisé au cours du 1er trimestre, prenant les caractères d’une prophétie auto-réalisatrice (je réponds en fonction de ce qu’on me dit que réponds mon voisin, et cela confirme ce qu’on m’a dit). Le plus « cristallisé » est le vote Macron. Le Pen a réussi à « pomper » les intentions de vote de Zemmour, et une partie du vote Pécresse (une autre partie des intentions de celle-ci passant chez Macron). JL Mélenchon a réussi « pomper » une grande partie des intentions de votes à gauche ou écologistes.

2. Si par « vote utile » on entend « être possiblement au second tour », seul deux sur trois peuvent en réalité prétendre être un « vote utile » : Macron et Le Pen. JL Mélenchon est dans cette enquête à 5,5 % derrière Le Pen, chez tous les autres sondeurs, plus médiocres mais encore plus récents, l’écart est de 6 à 7 % et se creuse en tendance ! C’est a fortiori vrai pour tous les autres. À moins d’un énorme retournement de l’opinion en 3 jours (mais le changement de pied de l’Europe sur l’embargo sur le gaz russe montre que tout est possible par temps de guerre), le premier tour est plié.

3. Sur le second tour, c’est 54-46 pour Macron, avec, comme pour tous les autres instituts, tendance à la réduction de l’écart, qui reste important mais beaucoup plus faible que l’écart de 2017.

Ma conclusion : le discours mélenchoniste, fondé sur l’invocation des sondages qui pourtant démentent « l’utilité » du vote (le « trou de souris » est fermé, quoi qu’en disent les journaux commanditaires de ces sondages, qui logiquement essaient de pimenter la partie), est consciemment mensonger. En revanche, le trou de souris n’apparait pas encore fermé pour MLP au second tour.

Donc le premier tour ne peut plus être qu’un vote de conviction : je suis écologiste, je suis pour le soutien à l’Ukraine et les sanctions contre l’agresseur, et notamment l’embargo sur le gaz russe, je vote pour le dire et pour le seul avec qui je sois d’accord, Jadot.
Ensuite au second tour, comme depuis Chirac/Le Pen (2002), je fais barrage à l’extrême droite.