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> Inventons la civilisation post-pétrole et solidaire (http://lipietz.net/?article2250)
par Alain Lipietz | 19 août 2008 Inventons la civilisation post-pétrole et solidaire Publié dans Les Echos, 20 aout 2009 "INVENTONS LA CIVILISATION POST-PETROLE ET SOLIDAIRE"Ouvrons n’importe journal imprimé, audiovisuel ou internet. Pas un numéro qui n’évoque, à la rubrique « environnement », l’ampleur de la crise écologique sous toutes ses formes (dérèglement climatique, crise pétrolière, pollution de l’air, fuites radioactives, émeutes de la faim, cyclone, etc.), et à la rubrique « économie » ou « social », la crise du pouvoir d’achat et ses conséquences (moral des ménages en berne, manifestations de pêcheurs et de routiers, saison touristique morose, chute de la bourse, licenciements massifs dans l’automobile et l’aéronautique, etc.). Les limites d’un tel système sont évidentes : le « logiciel » des Trente Glorieuses ne fonctionne plus. C’est l’humanité toute entière qui est concernée, riches comme pauvres, chaque écosystème qui est gravement menacé, chaque Etat qui doit répondre à de nouveaux défis.… « NOUS N’AVONS QU’UN SEUL MONDE » : JAMAIS CE SLOGAN DES ECOLOGISTES N’A ETE AUTANT D’ACTUALITE.Il faut donc apporter des solutions aux « deux crises », (écologique et sociale), en parvenant à dépasser enfin la contradiction entre réponses à la crise environnementale qui apparaissent parfois élitistes, voire anti-sociales, et réponses à la crise dite « du pouvoir d’achat » qui peuvent apparaître anti-environnementales, en ce qu’elles tendent à perpétuer des logiques énergétivores et gaspilleuses. DES EXEMPLES ?Lorsqu’on diminue l’usage régulier de l’automobile, en renforçant les transports collectifs ou en créant « vélib », on réduit la pollution, les gaz à effet de serre, la consommation pétrolière, tout en améliorant le droit à la mobilité de ceux qui n’ont pas les moyens d’avoir une voiture et la santé de ceux qui font du vélo régulièrement. On crée, d’autre part, de nombreux emplois non délocalisables donc plus robustes face aux risques de la mondialisation. Et la ville devient moins stressante. De même, si on remplace les voitures hyper consommatrices et polluantes (à commencer par les 4x4) par des véhicules plus petits, moins lourds, bridés à 120 km/h , on diminue la pollution et on réduit les coûts pour l’usager à la pompe. On ouvre aussi la possibilité de préservation de dizaines de milliers d’emplois, aujourd’hui menacés dans l’industrie automobile, en engageant une reconversion industrielle liée à ce changement d’usage de la voiture. Lorsqu’on isole thermiquement les logements, qu’on en profite pour développer les énergies renouvelables (solaire, éolien, géothermie). Non seulement on diminue ainsi les gaspillages, mais on diminue aussi le coût des charges locatives (notamment dans les logements sociaux). Et on revitalise l’économie en diminuant la facture pétrolière et en créant des centaines de milliers d’emplois non délocalisables. Quand on privilégie la consommation de fruits et légumes de saison, produits si possible biologiquement et à des distances raisonnables, on réduit fortement le gaspillage énergétique et on améliore notre santé. Mais on réduit également le coût pour les ménages (surtout si on met en place une « carte fruits et légumes » pour les ménages démunis, comme les Verts l’ont proposé à Paris) et on favorise la création d’emplois pérennes dans l’agriculture, beaucoup moins dépendants des aléas des cours internationaux. On pourrait multiplier ainsi les exemples : la mutation de la pêche vers une pratique qui préserve la ressource halieutique et diminue la consommation pétrolière, la mutation du tourisme de masse, de l’avion vers le train (au moins pour les voyages intra-continentaux), tout en privilégiant la durée des séjours, le basculement du transport de marchandises vers le rail… ANTICIPER LA RECONVERSION ECONOMIQUEDans tous les cas, la reconversion doit être anticipée dès maintenant et accompagnée par les pouvoirs publics, sinon elle sera bien plus douloureuse et coûteuse demain, surtout pour les plus vulnérables. Tous ces changements sont non seulement possibles (2% du PNB, selon Nicholas Stern, un sixième des dépenses militaires du monde, selon Lester Brown), mais indispensables si nous voulons éviter que l’humanité continue de foncer dans le mur. NI CATASTROPHISME, NI FATALITEIl ne s’agit pas ici de faire du catastrophisme, mais d’attirer l’attention sur la spirale extrêmement lourde dans laquelle nous sommes entrés avec l’énergie chère et le dérèglement climatique. Le Protocole de Kyoto sur le dérèglement climatique – le premier traité international « décroissant » - a d’ailleurs ouvert la voie à cette révolution culturelle. DES ECOLOGISTES RASSEMBLEES AUTOUR DE L’ENJEU DE CIVILISATION DU 21EME SIECLEIl nous revient donc la responsabilité de montrer que nous ne cherchons pas à exploiter l’angoisse mais que les responsables politiques ont la capacité à prendre en charge la crise, à condition d’effectuer le bon diagnostic. Les réponses techniques existent, nous les connaissons. A eux, à nous d’expliquer maintenant que chacun peut prendre sa part dans cette mutation, que cette mutation peut être équitable et qu’elle peut réduire l’injustice sociale là où la crise l’aggraverait. C’est autour de ce projet de décroissance solidaire, d’une société plus humaine, plus conviviale, plus sûre aussi que doivent dorénavant se rassembler les écologistes s’ils veulent que leurs idées se traduisent en politiques publiques. Ne ratons pas cet enjeu de civilisation pour le 21ème siècle. DENIS BAUPIN, maire adjoint de Paris, MARIE BLANDIN, sénatrice, YVES COCHET, député, MIREILLE FERRI, vice présidente région Ile de France, Photo yves.lecoq, sous licence CC. |
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