|
Accueil
>
Député européen (Verts, France)
>
Économie
>
Les services d’intérêt général
> Services d’Intérêt Général (SIG) et Constitution (http://lipietz.net/?article1113)
par Alain Lipietz | 1er octobre 2003 Affrontement en Commission Economique et Monétaire (CEM) Services d’Intérêt Général (SIG) et Constitution
Le Livre Vert est le début normal d’un processus qui doit aboutir à l’adoption d’une directive (dans le langage de la Constitution) sur les SIG. La demande d’une telle directive est une vieille recommandation de la gauche européenne. Il s’agit notamment de concevoir des SIG pour les réseaux européens (énergie, transports, communication) ce qui n’a pas de base légale suffisante dans les traités existants. Il y en aurait une si le Traité constitutionnel proposé par la Convention était adopté : l’article 16 qui définit les "domaines d’appui et de coordination de l’UE" et surtout l’article III-6 qui fournit explicitement cette base légale : "eu égard à la place qu’occupent les services d’intérêt économique général en tant que services auxquels tous dans l’Union attribuent une valeur ainsi qu’au rôle qu’ils jouent dans la promotion de sa cohésion sociale et territoriale, l’Union et ses États membres, chacun dans les limites de leurs compétences respectives et dans les limites du champ d’application de la Constitution, veillent à ce que ces services fonctionnent sur la base de principes et dans des conditions, notamment économiques et financières, qui leur permettent d’accomplir leurs missions. La loi européenne définit ces principes et ces conditions." Sinon on s’en tiendrait à l’article 85 devenu III-55 Alinéa 2 dans le texte de la Convention "Les entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général ou présentant le caractère d’un monopole fiscal sont soumises aux dispositions de la Constitution, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l’application de ces règles ne fait pas échec à l’accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. Le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l’intérêt de l’Union." Mais cet alinéa n’est qu’une tolérance au titre de la subsidiarité. Philippe Herzog proposait d’adopter par anticipation la base légale "constitutionnelle" des articles 16 et III-6 pour la directive future. La réaction, menée par les députés allemands Radwan (CSU) et Langen (CDU), mais aussi Rapkay (SPD), fut extrêmement véhémente. Les premières interventions allemandes pouvaient être comprises comme un refus de la tendance française à vouloir tout réglementer, y compris les services publics locaux (en fait Herzog s’en garde bien, mais il demande l’élaboration d’un droit communautaire pour les services délégués : voir son point 8). J’intervins en soutien à Herzog (GUE, liste communiste française) en expliquant que je comprenais la réticence des Allemands, que le rapport Langen (inspiré par la volonté des autorités locales allemandes de continuer à procéder comme elles l’entendaient pour leurs propres services publics) avait été une utile protection contre les tendances néo-libérales de la Commission européenne ; que le projet de Constitution offre enfin une base légale aux SIG européens et aux aides publiques correspondantes ; mais qu’enfin il faudrait bien fixer des règles du jeu sur les aides des Etats locaux (municipalités, lander) aux entreprises, car il y avait là aussi un facteur faussant la concurrence (et j’ai donné l’exemple de Ryanair quittant Strasbourg pour la rive droite du Rhin). La réponse de Messieurs Langen et Radwan fut presque aussi véhémente. Pour eux, il était hors de question d’asseoir la future directive SIG sur la base légale introduite par le projet de Constitution proposé par la Convention. Monsieur Langen est allé jusqu’à relire la Bible : l’article des traités existants sur la concurrence et la chasse aux aides publiques ! Pour lui, il faut au nom des traités, s’en tenir à la concurrence entre les Etats... et laisser les autorités locales faire ce qu’elles veulent, au nom de la subsidiarité ! Vieille tactique de la démocratie chrétienne allemande pour échapper à la rigueur libérale des traités... La violence de l’affrontement montre que l’étau se resserre sur le compromis de la droite allemande (concurrence féroce entre les pays, régulation très corporatiste au sein des régions). Elle montre surtout qu’au moins en ce qui concerne les services publics, ça va changer beaucoup de choses d’accepter le projet de la Convention ou de s’en tenir au Traité de Nice et précédents. PS : Lors de la réunion de la CEM du 7 octobre, le débat a repris. Le socialiste autrichien Ettl, soutenu par le CDU allemand Karas (!), a vivement critiqué l’attitude de Radwan, Langen, Rapkay. Le Réseau des Villes Autrichiennes soutient en effet le rapport Herzog, sur la base de la Convention, et l’attitude de Karas montre qu’il en est de même du Réseau des Villes Allemandes... Sur le Web : Le vote du rapport |
|
||