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par Brigitte Fichaux | 2 avril 2009

Colloque Alimentation soutenable
Introduction des produits biologiques en restauration collective
Je suis diététicienne, défendant à titre professionnel l’agriculture et l’alimentation biologique depuis 30 ans .
Depuis 10 ans déjà des essais d’introduction des produits bio en restauration scolaire ont été mis en place en Bretagne ; et j’ai été sollicitée par de nombreuses associations Bretonnes comme IBB, les Civam 35 et 49, les GAB 56 et 44, la maison de la Bio dans le Finistère pour former les personnels de cuisine et d’intendance. Depuis trois ans la Région Bretagne a mis en place pour tous les personnels de cuisine des lycées une formation diététique comportant 3 lots : hygiène, équilibre nutritionnel et introduction des produits bio .

Mon rôle dans ces formations, est de présenter l’intérêt nutritionnel des aliments bio, les aliments spécifiques de l’alimentation bio, leurs utilisations de base, et de les introduire dans des menus équilibrés et conformes aux normes du PNNS (Plan National Nutrition Santé). Cette formation est vécue comme essentielle par les cuisiniers pour lever les « craintes » de ne pas savoir faire et leur donner envie d’essayer !

CERTIFICATION : Les obligations de certification ne sont pas à ce jour obligatoires pour les restaurateurs, néanmoins une certification volontaire est possible en attendant le plan de contrôle en cours d’élaboration au niveau Européen. Le restaurateur a obligation d’informer et d’étiqueter toute allégation à l’agriculture biologique de manière « loyale, lisible et compréhensible » et de s’assurer que leur présentation n’est pas de nature à induire le consommateur en erreur.

HYGIÈNE ET NUTRITION : Les normes d’hygiène et d’équilibre nutritionnel sont très strictes en restauration collective et surtout restauration scolaire ; le déjeuner par exemple doit couvrir 40 % des besoins journaliers nutritionnels d’un enfant. Et être conforme aux recommandations du PNNS.

En résumé, le PNNS vise à augmenter la consommation des fruits et légumes, à diminuer les sucres « rapides » comme les produits sucrés et les féculents raffinés, à diminuer également les lipides et surtout les gras saturés pour augmenter les « bons » acides gras insaturés. Le but étant de limiter la montée de l’obésité et des pathologies cardio-vasculaires. Par ailleurs le PNNS insiste sur les besoins en minéraux indispensables comme le calcium et le fer, ainsi que les besoins en vitamines et en fibres.

Pour chacun de ces points, l’intérêt du bio est aujourd’hui évident et non contestable (cf les études du Pr JOYEUX menée en 2000 avec l’INSERM de Montpellier (étude ABARAC comparant les apports nutritionnels de 80 produits alimentaires en provenance des 3 types d’agriculture (Agri bio/A raisonnée/ et A Conventionnelle) ; relire également les dernières études publiées par l’AFSSA (lire toute l’étude et non la conclusion très restrictive !) :

PLAISIR DE MANGER

J’ai aussi de nombreux témoignages de cuisiniers faisant part de leurs difficultés à faire apprécier les légumes verts (donc à mettre en place le 1er point du PNNS), car admettent-ils eux-mêmes : ils sont sans saveurs ! Soit ils ne sont pas consommer et partent à la poubelle, avec un gâchis énorme (estimé à 25, 30 %) . Soit ils arrivent à « les faire passer » avec sauces et fromage (et c’est l’objectif moins de gras saturé qui n’est plus respecté !!). Par contre les légumes verts bio seraient globalement mieux appréciés (surtout chez les adultes !), et les fruits bio font l’unanimité et les enfants les consomment plus facilement.

Les produits laitiers bio on plus de goût et de saveurs, moins d’acidité : les yaourts peuvent donc être consommés moins sucrés (des tests auprès des petits convives de la cuisine centrale de Rennes ont montré qu’ils avaient préféré un yaourt bio parmi plusieurs non –bio !)

APPORTS EN PROTÉINES : UN POINT CLEF DE L’ÉQUILIBRE ALIMENTAIRE

Compte tenu des « dérives » constatées ces dernières années sur la piètre qualité nutritionnelle des repas servis en collectivité : avec des plats de « viande reconstituée » type cordon bleu avec à peine 10 % d’apport protéique, Le GEMRCN (Groupement d’études de marché en restauration collective) a établi de nouvelles recommandations relatives à la nutrition dans le cadre du PNNS parues eu JO N° J5 – 07 du 12/01/07

Des objectifs prioritaires à atteindre ont été fixés :

Rééquilibrer les apports en protéines animales et protéines végétales avec une fréquence souhaitable de consommation de certains plats protidiques dont voici quelques extraits :

Servir au maximum 4 repas / 20 contenant moins de 70 % du grammage recommandé de viande poisson ou œufs (ex : pour un enfant du primaire, le grammage conseillé = 80 g ; 70 % du grammage = 56 g)

Servir au minimum 4 repas / 20 contenant 100% du grammage recommandé de viande non hachée

Servir au minimum 4 repas / 20 avec du poisson ou une préparation à base de 70 % de poisson dont le rapport P/L = au moins 2

Pour le cuisinier souhaitant introduire les aliments bio en restauration collective, il est possible d’interpréter ces recommandations d’une toute autre manière et permettre ainsi de limiter les coûts des plats protidiques bio en diminuant les quantités de viandes, volailles, poisson :

Possibilité d’introduire au moins 8 repas /20 des préparations mixtes à base de céréales complètes ou légumineuses associées à 70 % seulement du grammage conseillé en viande, volaille ou poisson

Introduire plus souvent (2 repas/ 20) les œufs bio qui ne présentent aucun surcoût

Et limiter à 4 repas sur 20 des repas apportant 100 % du grammage recommandé en viande non hachée qui seront les seuls à engendrer un surcoût !

Toutes ces associations protidiques incluant céréales complètes ou légumineuses associées à un peu de viande ou de poisson (ou d’œufs) répondent parfaitement à toutes les recommandations du PNNS : apports protéiques équivalents en quantité et qualité à ceux d’une viande, richesse en sucres lents, en fibres, en minéraux et vitamines. Il serait bien sûr possible de proposer un à deux menus végétariens sur 20 du genre couscous ou curry ou paëlla sans viandes ; beaucoup moins couteux et tout aussi équilibrés, mais encore difficilement acceptées culturellement.

N’oublions pas que les produits laitiers présents à chaque repas viennent également compléter les apports en protéines animales.

BUDGET

Le surcoût du bio concerne surtout les fruits, certains légumes, et les viandes.

Il serait impossible de maintenir un coût de repas dans les normes en souhaitant introduire de la viande bio à chaque repas. Il est tout à fait possible diététiquement parlant de diminuer les quantités de viande et de maintenir un apport en protéines suffisant ; mais il est déjà intéressant de savoir que la qualité de la viande bio est telle que tout cuisinier de collectivité à pu remarquer qu’il pouvait diminuer d’environ sa commande de 20 % pour servir la même quantité de viande cuite /assiette ; le surcoût du bio est donc à relativiser !

Les œufs bio sont également à valoriser, ils sont de bien meilleur goût que les œufs conventionnels pour un très léger surcoût.

A savoir aussi : les subventions consenties à la restauration scolaire pour l’achat des produits laitiers seraient plus importantes pour les produits laitiers et contribueraient ainsi à en minimiser le surcout :

En effet L’office de l’élevage (ex ONILAIT) gère l’application d’une mesure communautaire dite « lait scolaire » en ce qui concerne l’octroi d’une aide communautaire pour la cession du lait et de certains produits laitiers

L’aide accordée pour les produits laitiers bio est plus importante que celle accordée aux produits non bio

Pour minimiser le surcoût des fruits et légumes verts, il est impératif de respecter la saisonnalité, la proximité d’approvisionnement et d’alterner entre frais, conserves et surgelés.

QUELQUES EXEMPLES CHIFFRES

Calculs à l’appui, il est possible d’affirmer qu’un repas comportant des céréales complètes biologiques avec 70 % du grammage conseillé en viande, volaille ou poisson, un produit laitier, une portion de légumes verts crus et une de cuits, un fruit cru couvrira parfaitement les apports nutritionnels souhaitables et ce pour un coût similaire à une ration équilibrée non bio.

Exemples et coûts de plats « mixtes » réalisés avec des produits bio

Pâtes demi-complètes aux légumes et au thon (avec 50 à 70 g/ pers de thon selon tranches d’âge) : coût revient /enfant du primaire : 1,02 euros [1].

Riz demi-complet et poulet à l’indienne (avec 50 à 70 g/ pers de poulet selon tranches d’âge) : coût revient /enfant du primaire : 1,03 euros*

Gratin de brocolis et jambon (avec 50 à 70 g/ pers de jambon selon tranches d’âge) : coût revient /enfant du primaire : 0,88 euros*

Vous trouverez d’autres exemples de menus « mixtes » dans la lettre « il fait bio dans mon assiette » publiée par IBB, et qui fait part de témoignages d’expériences menées en restauration collective dans toute la Bretagne . Les exemples de menus cités par IBB, ont un coût matière d’environ 1,60 Euros en primaire et entre 1,80 et 2 euros en lycée.

POUR CONCLURE

En diminuant les grammages en protéines animales à 70 % des grammages recommandés 8 repas / 20

En augmentant les apports en protéines végétales (céréales complètes et légumineuses)

En respectant les apports en laitages et fromages recommandés

Il est très facile de respecter absolument toutes les recommandations du PNNS tout en minimisant le surcoût de certains aliments bio

BESOINS DE FORMATION L’introduction du bio en restauration collective nécessite de la formation auprés des différents publics : cuisiniers et personnels de cuisine et de service, intendants, personnels enseignants (ou futurs enseignants dans les IUFM)

Plusieurs types d’interventions sont souhaitables :

 Avec des agriculteurs et transformateurs bio pour présenter les principes de l’agriculture biologique et les filières d’approvisionnement bio.

 Avec des diététiciennes : sur les aspects nutritionnels, l’intérêt des produits bio, l’équilibre des menus, la construction d’un plan alimentaire, les utilisations de base des produits nouveaux, la démonstration et la dégustation de recettes « mixtes » avec peu de viandes

 Avec des cuisiniers professionnels dans l’établissement demandeur

 Avec des conférenciers : pour informer enseignants et parents d’élèves pour que chacun comprenne bien tous les enjeux de l’introduction des produits bio et que tout cela débouche sur des projets cohérents dont on peut gager de la réussite !




NOTES


[1Coûts calculés par le GAB 56 au cours des journées formation « manger bio en restauration collective » en juin 2007.
titre documents joints

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