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par Alain Lipietz | 6 mai 2011

« Affaire Dany » : pour en finir avec les sornettes.

« Affaire Dany » : pour en finir avec les sornettes.

Toute la presse française, relayant une cabale lancée par certains Verts, attaque aujourd’hui Dany Cohn-Bendit pour pingrerie ou malhonnêteté. Il n’aurait pas reversé à Europe Écologie la part convenue de ses honoraires d’eurodéputé ?

Remarquons d’abord, pour ne plus y revenir, que lorsque cette cabale est lancée par certains Verts, elle ne vise qu’à faire invalider une motion pour le prochain congrès (motion qui a obtenu le tiers des signatures), obtenir le départ de Dany, et le départ d’une partie de ceux qui ont rejoint EELV à la suite de la campagne européenne. Quand la presse la relaie, il s’agit de discréditer Europe Écologie, seule « nouvel espoir à gauche » dans la France des années 2009-2011. Bon, chacun ses méthodes. Après le coup de « l’anarchiste allemand » et le coup du « pédophile », Dany en a vu d’autres, et l’écologie est insoluble dans la crise. Mais ça n’empêche pas de parler du fond.

Dany a avancé au mouvement EE-LV (alors non fusionné) la totalité de ses frais lors de ses quelques 8 mois de participation à la campagne des européennes de 2009, participation dont il est assez difficile de contester la « plus value » politique (et même financière) qu’elle a apporté au mouvement. Cette somme a été évaluée par Dany à un peu plus de 31000 euros dans un courrier du 4 avril 2011 au trésorier national EELV, qui n’a jamais répondu à cette lettre, mais qui par mail, un mois plus tard, ne conteste « ni la réalité ni la légitimité des frais avancés par Dany ».

Cette somme ne pouvait pas, pour l’essentiel, être remboursé par le financement public de la campagne : il s’agit de déplacements externes à la circonscription (Francfort-France, Bruxelles-France, etc) et de frais de logement. En tout état de cause le budget de la campagne européenne a dépassé le plafond légal de remboursements, tout en restant sous le plafond légal de dépenses.

Ne pouvant donc être à la charge de l’Etat, cette somme était à la charge du mouvement, comme toutes les invitations d’orateurs - dont moi-même, qui ai largement, quoique moins que Dany mais plus que bien des candidats, participé à la campagne européenne, mais qui n’ai rien demandé, bien sûr, pour les déplacements en Ile de France, où je réside. Ajoutons que, si elle est énorme pour un individu, la somme reste dérisoire à l’aune des frais de campagne.

Dany n’a pas été remboursé de ces 31000 euros à la fin de la campagne. Il n’a donc pu que : soit donner, soit prêter cette somme. En fait il l’a prêtée, et se rembourse en ne reversant rien au mouvement. Les reversements prévus sont de 1200 euros par mois et par eurodéputés. Le mouvement, au 20 avril 2011, reste donc en dette de 31000-21X1200 = 5800 euros vis-à-vis de Dany.

D’où vient cette cotisation ? elle a été fixée par les Verts avant la campagne de 1999, par une règle extrêmement précise où intervenait même une racine carrée (oui, oui). J’ai eu l’occasion de participer à la réunion des élus français du groupe Vert au parlement européen de Juillet 2009, la dernière pour moi, la première pour les nouveaux élus. Cette cotisation a soulevé un long débat, d’abord sur son destinataire (EE ou les Verts ?). C’est Dany lui-même qui a proposé pour en finir qu’en attendant de statuer, chaque député verserait 1000 euros par mois aux Verts. J’ai appris récemment que la cotisation a été fixée à 1200 euros pour EELV.

Cette procédure de remboursement présente 3 aspects : le fond (l’éthique), la coutume (les procédures usuelles de Verts) et la forme.

1. Sur le fond : loin d’une entorse à l’éthique, il faut reconnaître que Dany, en ne demandant pas le remboursement immédiat de ses frais, en faisant cette avance gratuite, a tiré une fameuse épine du pied du mouvement, qui est sorti de la campagne européenne totalement à sec (et l’est toujours).

2. Sur la coutume : elle est archi-usuelle chez les Verts et n’a rien d’un privilège imposé par Dany. Le remboursement d’une avance par soustraction sur des cotisations ou reversements a l’immense avantage de rester une affaire « privée », car ces cotisations ou reversements sont une affaire privée entre le parti et ses membres, sans incidence légale. Les seules « victimes relatives » en sont les élus-prêteurs, qui ne reçoivent pas de reçu fiscal sur les cotisations qu’ils auraient dû verser, mais sur le reliquat des remboursements. Or la fameuse « règle de la racine carrée » prenait en compte la réalité des abattements fiscaux. Mais cela ne concerne pas Dany qui paie ses impôts en Allemagne.. et de toute façon les élus nationaux et européens ne sont pas à plaindre !

Deux exemple personnels. Au cours de la mandature 1999, je devais embaucher sur mon budget parlementaire une « assistante d’interface » entre les Verts et moi, Laureline. Cela ne s’est pas bien passé entre Laureline et les Verts (qui m’avaient dicté son embauche), et son licenciement a été fort coûteux. Ce coût était du fait du parti, mais il ne pouvait le prendre en charge directement sauf à faire planer le soupçon d’un emploi fictif. Je l’ai donc pris en charge moi-même, sur mon épargne personnelle, et me suis remboursé sur mes cotisations jusqu’à la crise financière du parti en 2007, où j’ai abandonné ces arriérés (pas mes camarades verts ! la dette non remboursée).

De même, la banque ne faisant plus le moindre crédit à EELV, l’été-automne dernier le mouvement ne pouvait payer sa part (4000 euros) dans la campagne unitaire sur les retraites (frais avancés par la FSU) . Il a été décidé par le Collectif Retraites que « qui ne paierait pas n’aurait plus droit à la parole dans les meetings ». Pour que Cécile Duflot et nos autres orateurs puissent continuer à prendre la parole, j’ai avancé ces 4000 euros et me suis remboursé sur le remboursement préfectoral de ma campagne des Yvelines,

3. Sur la forme : il y a deux aspects : vis-à-vis de l’Etat, vis-à-vis du trésorier de EELV.

3.a. Vis-à-vis de l’Etat : rien n’a été violé de la légalité, l’Etat n’a rien remboursé en trop, le plafond de dépense (hors d’atteinte pur nous) n’a pas été dépassé. Il n’est pas clair si, selon des circulaires de la CNCCFP, ces dépenses, non remboursables, relative à l’interaction vie privée/campagne publique de la tête de liste (transports domicile-circonscription, logement) et financées par la tête de liste (qui n’est pas soumis au plafond d’apport des personnes physiques) auraient dû être déclarées. Par exemple un repas de travail hors circonscription entre un candidat et son équipe ne concerne pas la CNCFPP (je l’avais déclaré dans la campagne législative de 2009 et ce fut retoqué). En tout état de cause, le flux des avances, des remboursements et des cotisations est un arrangement privé tant qu’il ne s’agit que de prêt.
Si par hasard l’arrangement était brisé (par exemple si, hypothèse grotesque, Dany était invalidé et exclus de EELV), EELV se trouverait légalement dans une situation difficile (je ne parle pas ici de la dimension politique de la chose). Dany se retrouverait simplement président du groupe Vert au Parlement européen et adhérent vert allemand. Il n’aurait plus aucune raison de rien verser au parti français. La perte pour EELV serait considérable (deux ans et demi de cotisations à 1200 euros par mois !) et il est probable que EELV renoncerait à verser à Dany les quelques 6000 euros d’arriérés sur son avance. Mais alors il faudrait les déclarer comme dons au parti, peut-être même les réintégrer rétrospectivement dans le financement de campagne européenne (car tous les dons sont déduits du financement public), etc… Souhaitons que la douce folie des « faucons verts anti-Dany » s’arrête avant.

3.b. Vis-à-vis du mouvement. Le trésorier affirme qu’il n’a été mis au courant que le 4 avril par Dany. Or le trésorier est un homme honorable qui tient – il l’a précisé par mail— à son auto-estime. Glissons sur le fait qu’il aurait pu au moins jeter un œil sur les comptes de campagne et se demander « Mais saperlipopette, où ont-ils consigné les frais de transport et de logement de Dany et leur remboursement ? » Mais soit. Comme il l’écrit lui-même, ces frais sont « réels et légitimes » : il n’y avait pas pensé, avait juste remarqué, à son grand embarras, que Dany ne versait pas de cotisation, et Dany avait omis d’en parler avec lui.

Et c’est là que se lève l’affreux soupçon : Dany aurait diaboliquement dissimulé ce prêt (et ce dès 2009 en prévision du congrès de EELV de 2011) afin de provoquer son invalidation et se « victimiser » dans la presse. Le Figaro, citant un « cadre vert », précise même qu’il s’agirait de couler EELV pour favoriser DSK…

Cette dernière sornette conspirationniste est digne de la négation des attentats du 11 septembre, mais examinons-là.

D’abord, le trésorier des Verts est probablement de bonne foi jusqu’au 4 avril 2011. Je reste moi-même non-remboursé sur une part de mes frais de la campagne européenne 2009 (de l’ordre de quelques centaines d’euros seulement !), mais le même trésorier n’arrivait toujours pas cette semaine à mettre la main sur mes notes de frais, factures et billets de train et d’avion, envoyés au siège en bonne et dûe forme au fur et à mesure de mes déplacements. Habitué aux pertes de mes bagages par les compagnies aériennes, je ne m’en formaliserai pas (mais les compagnies aériennes remboursent les bagages perdus..) La situation au siège des Verts pendant la campagne Europe Écologie, juridiquement distincte, et elle-même découpée en sous-campagnes par le « découpage Raffarin », devait être assez chaotique.

Je ne peux donc exclure que Dany en ait parlé à son directeur de campagne, qui en a parlé à l’un des multiples trésoriers et salariés de la campagne 2009, qui n’en a pas avisé l’actuel trésorier national de EELV. Et on peut reprocher à Dany, qui connaît les Verts, de ne pas avoir exigé un accord écrit. Mais bon… moi même, dans les deux exemples cités plus haut, je m’étais contenté d’un engagement oral.

Reste une ultime question : pourquoi le trésorier, qui dispose le 4 avril de la lettre de Dany, n’en a-t-il pas avisé le Bureau Exécutif de EELV et les différents mandataire de motions, qui auraient pu empêcher, par un sec démenti, le développement ultérieur de la cabale interne, avant que la presse n’en fasse ses choux gras ? Serait-il lui aussi du complot anti EELV en faveur de DSK ?



À noter :

Le nième hoax de Pierre Minnaert.
Tel un vil sursaut d’hydre oyant jadis l’ange donner un sens plus pur aux mots de la tribu, Pierre Minnaert, totalement déconsidéré dans ses tentatives de manipuler les militants écologistes à travers les medias contre Dany, tente de « retourner contre Dany le dernier courriel de Dany » (cf http://www.construirelecologiepourtous.net/spip.php?article42 ) et crache ses derniers arguments (cf http://www.facebook.com/notes/pierre-minnaert/en-commentaire-au-texte-de-daniel-cohn-bendit/10150170802123884 )
1. Dany ne veut pas vraiment être secrétaire national.
Non, et il le dit. Je pense qu’il en est de même de Jacques Boutault pour la motion Envie.
L’ordre des listes des candidats au BE n’implique en aucune manière un ordre des préférences pour des postes. En tout état de cause , aucune motion ne peut espérer avoir plus de 6 ou 7 représentants sur 15 au Bureau Exécutif !
Dany dit explicitement dans son texte qu’il brigue le poste de délégué aux élections, pas de Secrétaire National. Le mandataire de CETT, Jean Desessard, serait en en effet à mes yeux un excellent SN, à mon avis meilleur car connaissant mieux la boutique que la deuxième de liste, Marie Bové.
De toute façon, les responsabilités se discuteront collectivement, après le congrès décentralisé, quand les EéVistes composeront leur exécutif pour affronter les très lourdes échéances à venir, loin du bourdonnement haineux de PM. Cécile Duflot a déjà annoncé que qu’elle ne serait SN que si sa motion gagnait le congres (sans préciser ce qu’elle entend par « gagner », mais les oppositions semblent pour le moment majoritaires), et le coup de Cachan montre qu’elle est prête à beaucoup de choses pour être ministre de DSK, ambition légitime mais qui serait incompatible en effet avec un travail de SN.
2. Dany est un mauvais président du groupe Vert au Parlement européen.
Il faut l’expliquer aux eurodéputés !
Depuis que Dany a succédé à Paul Lannoye, il a renoncé dans le groupe au comportement très individualiste dont il s’est toujours revendiqué (et qui avait en effet blessé bien des écologistes européens, moi compris et des militantes tres proches de moi), et a assumé à la satisfaction générale ses responsabilités dans un grand esprit d’écoute et de synthèse. C’est pourquoi il a toujours été réélu.
3. Dany vole EELVV en se faisant rembourser des frais qui ne correspondent pas à la camagne 2009.
L’argument de PM est en 2 temps.
a. Ce qu’il veut se faire remebourser est excessif : « J’ai de forts doutes [dit PM] sur la légalité de payer des allez-retour entre Francfort et Paris, en seconde classe j’espère, sur les comptes de la campagne électorale. ». PM feint de ne toujours pas avoir compris que les transport Francfort Paris ne sont pas remboursable de la campgne électorale. Non, ils ne le sont pas, pas plus que mes déplacements pour la meme campagne en dehors de l’Ile de France, ni même de mes déplacements de Villejuif à Poissy en RER pour ma campagne législative. Ce sont des dettes des Verts envers Dany, non de l’Etat envers Dany,.de même pour le logement à Paris loué pour sa campagne (encore que ça pourrait se plaider, mais mieux vaut une bonne transaction avec la CNCCFP qu’un interminable contentieux).
b. On lit encore :dans le texte de Dany : « Au total, ce sont près de 31 200 euros que j’ai donc dû débourser. Par ailleurs, je dois aussi mentionner mes différentes contributions financières aux initiatives "Europe Ecologie" après les élections européennes dans la mesure où nous n’avons pas pu obtenir le soutien du côté des Verts ». PM commente « Autrement dit rien à voir avec la campagne des européennes ». Non. Dany dit très clairement « Voici « au total » ce qui est à la charge des Verts, et « par ailleurs » il y a des frais que je mentionne et qui ne sont pas à la charge des Verts [ mais qui ont contribué au succès de EELV] »
Petite remarque personnelle : le gag du « en seconde classe j’espère ». Eh bien non. Vu le rythme auquel les candidat-e-s et « orateurs/trices » ont tous et toutes bossé pour cette campagne, on prenait l’avion chaque fois que cela faisait gagner du temps. PM, qui n’a pas levé le petit doigt pour cette campagne, ignore la fièvre de ces initiatives incessantes pendant 8 mois. Plusieurs personnes tenaient nos agendas et tachaient de répondre, en jonglant avec les horaires, aux sollicitations continues des groupes locaux qui, contrairement à PM, militaient pour notre succès collectif.
4. Dany décidait lui-meme de ces dépenses alors qu’une comptabilité plus précise aurait permis de se faire rembourser par l’Etat.
Et bien non. D’abord tous les déplacements étaient définis par l’équipe de campagne. Quand on faisait un meeting à Trifouillis, c’était un choix par rapport à 5 autres demandes de meeting à la meme date. Et nous avons tous en général avancé l’argent, ceux qui comme moi ont scrupuleusement renvoyer nos notes de frais au fur et à mesure n’ont toujours pas été remboursés sauf quand ils avaient le temps de pousser un coup de gueule à la Chocolaterie. Et la raison qui nous a été donnée ? « On a déjà explosé le plafond de remboursements, et Les Verts n’ont pas actuellement les moyens de vous rembourser ».
Bref : le courriel de Dany confirme point par point ce que PM appelle « les eculubrations de Alain Lipietz »

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