Cette semaine, Bruxelles, « semaine de groupe ». C’est-à-dire celle où il est le plus facile de caser ses rendez-vous… Je rencontre successivement les ambassadeurs de Colombie, du Venezuela et le secrétaire général de la Communauté andine (CAN). Pendant les trous, je rédige mon blog-compte-rendu du Conseil national des Verts, après la rupture Verts/PS.
Et, ô surprise, coup de téléphone de Béatrice Vallaeys, une des mères fondatrices de Libération, très contente d’un large extrait de mon blog « Ah quelles terribles 6 heures du soir ! », mais qu’elle veut que j’actualise et réduise à 6000 signes. Petite discussion sur Sarkozy. Elle me rappelle les premiers temps, très « modernistes », de Valéry Giscard d’Estaing en 1974, avec Servan-Schreiber, Françoise Giroud... Et la composition du gouvernement, vendredi, confirmera tout à fait cette impression : les transfuges du centre gauche se bousculent auprès de l’hôte du Fouquet’s, du jet privé et du yacht de Bolloré. Je lui demande si la comparaison avec Carlos Menem dira quelque chose à ses lecteurs, elle pense que oui, pour une partie d’entre eux.
Je rédige donc l’article qui paraîtra le jour de la transmission du pouvoir, en insistant en conclusion sur une ferme mise au point : la rupture Verts/PS ne doit pas conduire à mettre le centre sur le même plan que la gauche !
L’ambassadeur de Colombie est venu, à sa demande, m’expliquer qu’il y avait eu un malentendu sur le projet que nous (les eurodéputés) avions eu d’organiser à Bogota un colloque sur la « justice transitionnelle ». C’est-à-dire les formes d’amnistie qui doivent clore une guerre civile mais en respectant tout de même les principes de vérité, justice et réparation. Il m’indique très solennellement que, contrairement à ce que notre délégation avait compris lors d’une réunion antérieure, la Colombie est « pour » l’organisation de ce colloque… Dont acte.
Ce changement de pied a-t-il à voir avec les virevoltes du Président Uribe sur l’échange humanitaire et la "libération des otages par la force " ? Ou avec les accusations lancées par les chefs paramilitaires "démilitarisés" contre les plus hautes sphères de l’État, y compris le vice président Santos ?J’avoue ne plus rien y comprendre et craindre le pire pour Ingrid, prise entre des bourreaux (les FARC) qui la traitent de manière inhumaine (mais on sait au moins qu’elle est vivante) et un Président qui se réveille périodiquement en donnant l’ordre de la "libérer" militairement.
C’est au tour de l’ambassadeur du Vénézuela, très inquiet d’une initiative de la droite qui veut déposer une motion d’urgence la semaine prochaine à Strasbourg à propos du non-renouvellement de la concession de 20 ans d’un canal de télévision VHF à la chaîne RCTV. En fait, la bande VHF (celle qui est occupée en France par TFI et M6 pour le privé, France 2 et France 3 pour le public), est occupée là-bas par une chaîne publique et cinq chaînes privées. Mais, au Venezuela, les téléviseurs sont abreuvés par des dizaines de chaînes privées, plus hystériques les unes que les autres, et depuis le début, contre Hugo Chavez, ce président métis. Ces chaînes sont émises sur VHF, UHF, câble et satellite. RCTV, dont la concession ne va pas être renouvelée sur VHF, émet évidemment via l’ensemble de ces moyens de transmission. L’organisme régulateur de l’espace hertzien du Vénézuela lui reproche très légitimement beaucoup de choses dont… la participation au coup d’État militaire de 2002 !
Et Reporteurs sans Frontière, qui avait à l’époque dénoncé le comportement de RCTV, bat aujourd’hui la campagne en faveur de cette « télé-Pinochet » vénézuelienne !! Les Besson, Charasse et autres sont partout…
Parfaitement au courant de la situation du Paysage Audiovisuel Vénézuelien, j’essaie d’alerter, mais en vain, les coordinateurs qui préparent les séances de « motions d’urgences » (qui servent essentiellement la cause des droits de l’homme). La bataille aura lieu la semaine prochaine à Strasbourg.
Quant au secrétaire général de la CAN, mon ami Freddy Elhers, nous passons ensemble une partie de la matinée et le déjeuner… pour parler essentiellement non pas tant de l’accord d’association EU-CAN que d’écologie. Je lui raconte l’histoire de la mort d’Homère (« Ce que nous avons pris, nous l’avons laissé sur place, et ce que nous n’avons pas pris, nous l’emportons avec nous »). Au quart de tour, lui a deviné le sens écologiste de cette énigme !
Le mercredi après-midi est occupé par une initiative du groupe Vert visant à tirer au clair la sombre histoire de la papeterie géante de Fray Bentos, installée par une firme finlandaise en Uruguay, qui provoque d’énormes manifestations de protestation sur l’autre rive du Rio Uruguay, en Argentine.
Mon avis a toujours été (et c’est aussi l’avis des Verts finlandais) que cette usine de cellulose pour la pâte à papier est le top de la technologie existant en Finlande. Mais le débat nous fait découvrir d’autres aspects : derrière cette usine s’en profilait une autre (une usine espagnole : ENCE), et derrière ce pôle papetier dirigé vers l’exportation, tout un réseau de plantations d’eucalyptus avec les routes correspondantes.
Finalement, nous nous retrouvons à nouveau, après mon initiative précédente sur le palmier à huile, dans la problématique des conflits pour l’usage des terres. Un conflit qu’on résume en anglais par les « 4 F » : Food (la nourriture pour les humains), Feed (la nourriture pour les animaux, comme les tourteaux de soja), Fuel (les plantes à agrocarburants comme la canne à sucre et le palmier à huile) et… Forest. Mais dans « Forest », il y a bien sûr les forêts primitives ou secondaires riches en biodiversité ; et puis, il y a les forêts plantées pour un usage industriel. Ce qui me fait réfléchir à nos forêts européennes, dont aucune n’est naturelle. Toutes sont coupées périodiquement, pour le bois de construction, le bois de chauffe ou les sapins de Noël. Pourtant, j’aime bien m’y promener, dans mon Morvan. Enfin, pas dans les forêts de sapins de Noël…
Et ce week- end de l’Ascension, on commence à distribuer des tracts pour ma première réunion de campagne législative, lundi prochain. Finalement, la trahison de Bennahmias a été assez circonscrite et aussitôt réparée : trois candidats verts des Bouches du Rhône, un en Seine et Marne et un de la circonscription de Rochefort seulement, semble-t-il, sont allés vendre leurs services (ou acheter leur franchise) au Modem. Moins que de transfuges de la gauche parmi les dignitaires nommés par Sarkozy…
Maigre consolation.