Adhésion des pays candidats
Nous n’avons pas voté le rapport

9 avril 2003 par Alain Lipietz

Pourquoi nous n’avons pas voté le rapport pour l’adhésion des pays candidats.

Le 9 Avril 2003 aurait dû être un jour de fête : le vote par le Parlement européen des traités d’adhésion des 10 pays candidats.

Hélas ! les Verts ont toujours dit que l’élargissement ne pourrait être réussi que si l’Europe ne dotait d’abord des moyens de prendre des décisions politiques à 25, notamment en matières fiscales, sociales, environnementales (voir mon livre Refonder l’espérance, chapitre 10, ou mon intervention au Colloque de Die). Bref, "pas d’élargissement sans approfondissement".

Et voici que nous est proposé un élargissement massif de l’Europe, alors que le traité de Nice a rendu celle-ci ingouvernable, et que la convention pour la Constitution européenne piétine !

Ce problème n’est pas "un problème des pays candidats" : ceux-ci convergeront certainement plus vite vers le "modèle européen" en entrant dans l’Union (moyennant des mesures de transition : voir mon rapport sur les pays candidats qu’en restant au dehors. C’est un problème de l’Union telle qu’elle est aujourd’hui : elle n’a pas su se préparer à l’élargissement !

Dans ces conditions, l’adhésion des pays candidats, en aggravant la paralysie des volets politique, social, écologique dans l’Union, la fait évoluer vers une zone de libre échange commercial sans règle commune (d’autant que même les aides agricoles ne s’appliqueront pas immédiatement aux nouveaux entrants !).

Cette orientation, conforme au schéma rêvé par George W. Bush et les néo-conservateurs Américains ("la nouvelle Europe"), mais aussi par leurs alliés Européens (Blair, Aznar, Berlusconi), est d’ailleurs confirmée, y compris dans son aspect diplomatique, par le rapport Brok recommandant l’adhésion, qui dans son article 6 insiste sur le resserrement des liens transatlantiques.

Ayant à exprimer le refus d’une telle Europe sans pour autant que ce refus soit interprété comme un rejet de telle ou telle candidature, les Verts/ALE ont décidé, à une large majorité, des votes séparés "oui" à chacun des pays, mais de rajouter le rapport Brok. Tel est notamment le sens de mon propre vote.

Finalement, le rapport Brok a été adopté par 451 voix pour, 68 voix contre et 24 abstentions (dont les nôtres et celles de la GUE). Les votes pour l’adhésion des pays ont été acquis avec de trente à soixante voix de plus, ce qui exprime bien l’intention des Verts/ALE, et certaines réticences particulières (la droite allemande votant contre la Tchéquie à cause de sa non-condamnation des décrets Bénès).

Voir les rapports de briefing-debriefing de notre collaboratrice pour la Commission des affaires étragères, Micheyle Rieu.



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