Le groupe Vert tient sa réunion à Istanbul !
par Alain Lipietz

vendredi 22 octobre 2004

Jamais une réunion du groupe Vert-ALE n’a été autant couverte par la presse. Plus de cinquante médias : évidemment tous les Turcs, CNN, etc... Mais la télévision française, à part I-télévision, n’est pas là. Pourtant c’est LE pays où la question de l’entrée de la Turquie fait débat. Preuve, s’il en faut, que ce débat est essentiellement franco-français et se fiche comme de l’an 40 de la réalité turque d’aujourd’hui.

Non seulement les médias sont là, mais surtout les représentants de la société civile et de la société politique : nous avons même eu droit à un débat entre le ministre des Affaires étrangères allemand, le Vert Joschka Fischer, et son collègue turc, Abdullah Gül.

Les représentants de la société civile, en particulier ceux des minorités et les représentantes des femmes , sont unanimes : "Il faut que la Turquie rentre dans l’Europe, ça ira beaucoup mieux pour nous". Cela les place souvent dans une contradiction entre la tendance à affirmer que tout va nettement mieux, de façon à ne pas prêter d’argument à ceux qui, en Europe, souhaiteraient faire barrage à la Turquie, et leur activité militante, qui les amène à critiquer tout ce qui ne va pas encore vraiment bien en Turquie !

Aux pauses-café, je discute avec ces « minorités » (Kurdes, Alevis, Arméniens...). Les Arméniens insistent : "Dites à la diaspora de se calmer. Nous, nous voulons rentrer dans l’Europe, nous y serons bien mieux respectés et protégés." Un intellectuel, à la tribune (Murat Belge, de l’Assemblée des Citoyens pour les Accords d’Helsinki) aborde lui-même la question arménienne en disant "Cessez de nous donner des leçons, nous serons capables de faire avancer ce débat nous-mêmes".

Je vais discuter avec mon vieil ami le sociologue Ahmed Insel, pour lui dire que de tels propos sont inadmissibles : pour l’Europe la réconciliation et donc la mise sur la table des crimes du passé a été constitutive du miracle franco-allemand de 1957. Il en sera forcément de même entre la Turquie, les fantômes de son passé... et les héritiers de ce passé qui ont trouvé refuge en Europe occidentale. Ahmed m’explique alors que cet intellectuel est un de ceux qui abordent le débat arménien dans sa revue…



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