Alternatives Economiques
Sur "La France d’après" de Guillaume Duval

27 mai 2011 par Alain Lipietz

Sur "La France d’après" de Guillaume Duval

Recension à paraitre dans Alternatives Économiques.

Sur "La France d’après" de Guillaume Duval

Recenser dans une revue le livre-synthèse de son rédacteur en chef est l’occasion d’une vertigineuse mise en abîme. C’est tout l’esprit Alter Éco qui défile ! Une sorte de best off de son journal préféré. Forcément, on n’est pas objectif . On aime Alter Eco ? on aimera La France d’après, de Guillaume Duval, et on sera fier de l’aimer ! Une synthèse enlevée de « nos » analyses de la crise, celle qu’Alter Éco nous a fait partager. Et surtout de ce que la revue propose, pour aujourd’hui, pour demain et pour 2012, afin de sortir de la crise.

Mais, dans le concerto d’Alter Eco, on aimera mieux distinguer la petite musique de son premier violon. Lorsque Guillaume, il y a vingt ans, pointa son sourire curieux dans la commission économique des Verts, deux traits frappèrent ou agacèrent : c’était un vrai ingénieur, et il connaissait bien l’Allemagne. Il partait de la vie matérielle, et il aimait son pays avec les yeux d’un étranger.

Ces qualités éclatent dès le premier chapitre : « La crise est beaucoup plus qu’une crise financière », provocation contre la vulgate de droite et de gauche. Plus ? D’abord une crise sociale, une crise de la distribution mondiale des revenus. Car l’analyse part du monde pour arriver à la France en passant par l’Europe. La mondialisation ? Oui, mais pas comme tout le monde «  : « La mondialisation, commence-t-il, c’est d’abord l’urbanisation du tiers monde. » Et au fond, la crise est « déjà en une crise écologique ». Démonstration peut-être un peu rapide, mais qui amorce le déroulé de la réponse à la crise : « L’Europe doit accélérer la conversion écologique de son économie ». Ou, plus provocateur : « L’Europe ne sera pas sociale, elle peut être écologique »

On s’étonnera de la densité de ce livre finalement assez court, mais bourré de graphiques : minutieuse analyse des problèmes de la Chine, éloge des 35 heures et de la dépense publique, critique des plans d’aide à la Grèce et appel au fédéralisme et même à un certain protectionnisme européen, et bien sûr critique éclairante du « modèle allemand ». Avec ça ponctué d’autocritiques (« en 2001 nous pensions que… à tort. »)

Avec l’optimisme de la volonté, mais fondé sur le réalisme. se déroulent les plans d’un New Deal vert. Plans ? Oui, Guillaume Duval ne cache pas des sympathies « planistes », une nostalgie de la Reconstruction (Monnet…). Mais — remarquable chapitre final— le retour de la planification doit s’accompagner d’un grand retour de la démocratie sociale, du dialogue social organisé (et pas de « l’ordo-libéralisme », « gouvernement par les règles » de la droite allemande).

Oui, il y a une musique Duval, à méditer.



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