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par Alain Lipietz | 19 avril 2017

Pour Hamon, un vote raisonné.
Il y a juste un mois, j’écrivais que, faute d’unité des candidats de gauche, ceux qui souhaitent absolument éviter le danger principal, un duel Le Pen / Fillon au second tour, n’auraient plus qu’à voter Macron. Et que je me battrais jusqu’au dernier moment pour cette unité. L’heure est venue de ce dernier moment.

Et il faut bien le constater : le combat pour l’unité est un échec, donc la gauche sera absente du second tour. Les derniers sondages que j’ai sous les yeux (Opinionway et Harris) sont clairs : Le Pen et Macron font toujours la course en tête. Macron a 4 à 6 points d’avance sur Mélenchon, qui plafonne depuis une semaine à 19 %, à nouveau devancé d’un cheveu par Fillon. La possibilité d’une inversion de ces résultats, soit du fait de la marge d’erreur, soit du fait de changements dans l’opinion les jours à venir, reste faible, mais non négligeable.

 S’en tenir au moins pire ?

Dans ces conditions, je comprends la position de celles et ceux, écologistes ou personnes de gauche sincères, qui voteront Macron, « le moins pire ». Je me dois cependant de discuter l’hypothèse Mélenchon. Car depuis un mois je répondais à ceux qui me questionnaient sur l’unité Hamon-Mélenchon « Mais comment les départager ? » Je proposais soit un nouvelle primaire, soit un gros sondage commun. C’est ce qui s’est passé « sauvagement » et c’est désormais tranché en faveur de Mélenchon. Ce serait à Hamon de se retirer au profit de Mélenchon. Leurs potentiels électoraux (19+8) ne s’additionnent pas complètement, mais il éliminerait vraisemblablement et Macron et Fillon dès le premier tour, puis Le Pen au second tour.

Et dans ce cas c’est à Mélenchon (demandeur) de faire le premier pas, en proposant quelque chose à Hamon et à son électorat : tout le monde n’a pas le sens des responsabilité de Jadot et des écologistes (le « principe de responsabilité » étant d’ailleurs le thème dont ils ont le monopole, quelles que soit les questions, ce qui fait que leur vote « partisan » est le plus fragile). Ce pas, JL Mélenchon ne l’a pas fait, n’a même pas fait semblant, a multiplié au contraire les sarcasmes, et donc nous sommes dans la même situation qu’il y a un mois : contre Le Pen / Fillon, le plus sûr reste Macron.

Sauf que les « marges d’incertitudes » font que l’on peut encore rêver que Mélenchon batte et Fillon, et Macron. Macron n’a plus le monopole du « vote utile ». Pire : le vote tactique en faveur de Macron ne garantit plus qu’il devance Fillon, tant se dévoilent la vacuité de ses envolées, et les dangers de ce qu’il ose préciser. Il n’est plus le « pole attracteur ».

Je reçois des invitations de mélenchonistes à lancer un appel pour contribuer à cette prophétie auto-réalisatrice : que le vote Mélenchon aspire le vote Hamon, puisqu’il est le seul « utile et de gauche ». Un pas que le très estimable maire EELV de Grenoble, Eric Piolle, n’a pas hésité à franchir. Moi si.

 Tenter Mélenchon ?

L’argument principal d’Eric Piolle est de donner des gages à l’unité d’un camp progressiste, étant donné que tous, Jadot, Hamon, Mélenchon, ont adopté un programme résolument écologiste. Et c’est en effet l’énorme nouveauté de cette campagne : tout les candidats de l’ancienne « majorité plurielle » de L. Jospin ont adopté des programmes beaucoup plus écologistes que ne l’a jamais été Jospin. Un résultat à relativiser : encore une fois Mélenchon + Hamon soutenu par Jadot, ça ne fait que 27% dans les sondages. On est loin de « l’hégémonie culturelle ». Mais bon, pour l’avenir, cela signifie qu’il est désormais difficile de présenter un programme « de gauche » qui ne soit pas au moins « écosocialiste. »

Et il faut le reconnaître : la radicalité du programme de Mélenchon n’a rien à voir avec celle du Programme commun de la Gauche de 1973-81. Il ne propose plus la nationalisation de toutes les banques et des grands monopoles industriels, promesse tenue par Mitterrand en 1981. En revanche il intègre les crises écologiques à un niveau inimaginable il y a encore quelques années. Y compris la crise alimentaire, « point aveugle de EELV » et des programmes de Jadot/Hamon. Et il en parle très bien. Ou plus exactement il parle très bien des crises écologiques locales : on y reviendra.

Cependant, JL Mélenchon a-t-il vraiment donné des gages à cette unité écosocialiste future ? Pas vraiment, on l’a vu : contrairement à son héros proclamé, François Mitterrand, qui a su négocier l’unité, du PCF de G. Marchais au vieux Parti Radical-socialiste, JL Mélenchon en est resté à : « On ne peut pas s’allier avec quelqu’un qui reste dans le même parti que ceux qui ont voté la loi El-Khomri ».

Ben… disons le tout net : j’ai combattu cette loi, mais si la Gauche écosocialiste doit pour toujours exclure ceux qui furent partisans de cette loi (dont la Cfdt), elle ne sera plus jamais majoritaire à 51%, ce qui est ennuyeux pour un candidat qui prône la proportionnelle.

Ce n’est pas le seul problème. Énumérons-en quelques autres.

Le programme économique

Un peu comme P. Juquin en 1988, JL Mélenchon promet tout, à tout le monde : plus de salaire et moins de temps de travail, plus d’investissements publics (naturellement « verts ») et moins de dette publique, le tout financé par un bond en avant de la croissance.

Ce n’est certes pas absurde « en tendance ». Car la crise actuelle n’a rien à voir avec celle qui avait condamné le Programme Commun de la Gauche mis en œuvre (la première année) par F. Mitterrand en 1981. La crise d’alors, celle du Fordisme, était « classique » : baisse tendancielle et réelle des taux de profit. Il n’y avait plus grand-chose à distribuer. La crise du libéralisme ouverte 30 ans plus tard est à l’inverse « keynésienne » : les profits sont rétablis, la rente est faible, les taux d’intérêt réels négatifs. Ce qui manque pour investir et embaucher, c’est la demande sociale (des consommateurs et de l’État) ! C’était d’ailleurs l’argument du programme économique de la candidate verte E. Joly en 2012.

Seulement, voilà : le programme d’Eva Joly, plus modeste, avait été validé sur un modèle économétrique officiel, celui de l’OFCE, dont personne ne nie le caractère « keynésien ». Les paramètres de ce modèle sont ajustés par l’observation de ce qui se passe réellement. En particulier les « coefficients multiplicateurs » : de combien augmente la production quand l’Etat dépense tant pour cent de plus ? etc. L’équipe de Mélenchon justifie son programme par des multiplicateurs déraisonnables.

Plus grave pour un programme qui se veut écologiste : aucune évaluation sérieuse de la question « De combien augmentent les pollutions pour une telle croissance ? ». Contrairement aux affirmation un peu « dandy » de certains partisans de la Décroissance, je suis persuadé que le « découplage » est possible, qu’on peut augmenter le niveau de vie des plus démunis tout en faisant baisser les pollutions… mais certes pas à un tel rythme.

Bref, JL Mélenchon vend largement du vent. Ce qui est normal dans une campagne ? Pas pour les écologistes, justement.

Les questions internationales

On peut considérer que ce sont des questions secondaires dans une campagne nationale. Pourtant, si, comme beaucoup le pensent, la crise présente est du type de celle des années 30, alors la guerre, ou des guerres, sont à craindre dans un horizon proche. Et le type d’alliances prônées par JL Mélenchon, strictement « réalistes », ne manque pas d’étonner, alors que les conflits en cours opposent largement des régimes autoritaires–nationalistes et des pays recherchant une paix fondée sur le multilatéralisme, la résolution collective des problèmes et le respect de normes, ou des mouvements de révoltes sociales visant à chasser ces régimes autoritaires.

Le mépris affiché par JL Mélenchon envers le Printemps arabe et en particulier syrien (« notre Guerre d’Espagne »), ramené à une histoire fumeuse d’oléoducs, son soutien aux bombardements russes en tapis sur Alep (et pas sur Daesh), alors que la moindre bavure américaine fait l’objet d’une enquête autocritique de l’US Air-Force, a déjà provoqué l’écœurement des spécialistes de la région, que ce soit JP Filiu ou Dominique Vidal.

Plus grave encore : la question européenne. L’auto-positionnement de JL Mélenchon comme « indépendantiste français », et son histoire de plan A et de plan B, sont assez rédhibitoires. Plan A : je propose à nos 25 partenaires de l’Union européenne un plan de réforme des traités, plan B : s’ils ne sont pas d’accord, la France quitte l’Union !

Comme si nous devions quitter la France si Fillon est élu…

Les réformes proposées par JL Mélenchon vont dans le bon sens. J’ai voté contre le traité de Maastricht (que JL Mélenchon a soutenu), parce qu’il donnait la primauté à l’unification par le marché ; j’ai voté pour le TCE (que JL Mélenchon a combattu) parce qu’il adoptait une charte des droits la plus avancée de l’Histoire, faisait faire un bond en avant aux domaines décidés par la majorité des citoyens (et non par les bureaucraties nationales), et faisait sauter des droits de vetos des gouvernements nationaux sur nombre de sujets économiques et sociaux.

Nous pouvons constater aujourd’hui le résultat de l’adoption de Maastricht et du rejet du TCE : la pure et simple dictature des marchés ! Je me réjouis donc de voir Mélenchon chercher à sortir l’Europe de sa double erreur.

Tout le monde peut se tromper, mais la nouvelle erreur de JL Mélenchon est de croire que son Plan B (le Frexit) serait si terrible pour l’Europe riche (Allemagne et Scandinavie) qu’elle reculerait devant une telle « dissuasion » ! Non, le Frexit, et même le départ de toute l’Europe du sud, « ce Club Med, ces fainéants et ces endettés », la droite des pays riches ne rêve que de ça. C’est pourquoi ni Syriza ni Podemos n’ont jamais parlé de quitter l’Europe ou l’euro. Ça, c’est le discours de Pepe Grillo et de « 5 étoiles » en Italie, ou des amis européen de Le Pen. Si JL Mélenchon veut voir un jour l’Europe accepter ses propositions, alors il faut rester dedans, et construire patiemment une force sociale européenne en ce sens, avec les syndicats, la société civile, et des gouvernements amis.

En particulier, tout ce que veulent les écologistes en matière de lutte contre les crises écologiques globales, effet de serre, effondrement de la biodiversité, pénurie alimentaire mondiale, tragédies des réfugiés, etc. ne pourrait plus être défendu à partir d’une France isolée, ne pesant plus grand chose dans le monde. Pour les écologistes, « l’indépendantisme français » est contreproductif car « le nuage de Tchernobyl ne s’est pas arrêté à la frontière ». Nous sommes résolument transnationalistes.

Il y a quelques jours, à Dijon, JL Mélenchon semble avoir enfin compris l’impasse dans laquelle il s’est enfermé sur ce sujet-clé, qui lui barre sans doute la route du second tour. Rassurant les Français, il déclare désormais ne vouloir sortir ni de l’Europe ni de l’euro : son plan B ne dissuade que les électeurs qui lui manquent.

Autrement dit, la question européenne n’est pour lui qu’une question de tactique électorale. Contrairement aux hommes et aux femmes assumant leur rôle de leaders, il ne se bat pas pour ce qu’il croit nécessaire, quitte à aller à contre-courant de ses partisans. Et d’abord les convaincre de ce qui, depuis Jaurès, Marx, Hugo, et même Montesquieu, et même l’esclave romain Terence, constitue le socle de la gauche humaniste transhistorique : nous sommes d’abord des Terriens , puis des Européens , puis des Français.

On rêve d’un Mélenchon qui, avec son immense talent oratoire, face à ses immenses publics, aurait osé relever le débat enfoui depuis le vote tragique de 2005 : la construction de la Nation européenne, de la souveraineté démocratique des Européens sur leur « marché unique ». Imaginez !

« Nous ne serons jamais autant Français qu’en y jetant toutes nos forces. La nation est un mot nouveau qui est né pendant la Révolution française, par opposition au morcellement féodal des peuples de France sous la monarchie.
La nation est le lieu de la citoyenneté ; elle n’est ni éthique, ni religieuse, ni linguistique. La citoyenneté est dans l’exercice collectif du pouvoir. Là où est le pouvoir réel, là doit s’exercer la citoyenneté. Là où est la citoyenneté, là est la nation.

Tout se tient dans la tradition française entre la démocratie et la nation. Si le pouvoir réel de maîtriser notre destin ne peut prendre toute sa réalité économique et sociale qu’à l’échelle de l’Europe, alors, les vrais démocrates ne peuvent que vouloir l’avènement de la nation européenne et, avec elle, de la citoyenneté européenne."

La foule vibre. Les hologrammes marquent une pause. Puis reprennent, tonitruants :

"Quand on aime la France – et on peut l’aimer de bien des façons – on sait qu’on ne peut la faire dans un seul pays. Si j’adhère aux avancées des traités en matière de citoyenneté européenne, bien qu’elles soient insuffisantes à nos yeux, vous devez le savoir, c’est parce que le plus grand nombre d’entre nous y voient un pas vers ce qui compte, vers ce que nous voulons et portons sans nous cacher : la volonté de voir naître la nation européenne et, avec elle, le patriotisme nouveau qu’elle appelle !! »

C’était le discours de JL Mélenchon au Sénat, le 9 juin 1992. Pas d’eurocentrisme : il ferait tout aussi bien en faveur de la République universelle !

Le style de gouvernance

Je l’avoue : j’ai hésité, en même temps que E. Piolle, à appeler à voter Mélenchon, et pour les mêmes raisons. Ce qui m’en a retenu par la manche le week-end de Pâques, c’est la volée de bois vert numérique adressée à tous ceux, parmi les personnalités respectables de la gauche de la gauche, militant d’Alternatiba ou journaliste du Monde diplomatique, qui osaient critiquer.

On m’a répondu : « Mais tu ne vas pas laisser passer cette chance historique, ce pied coincé dans la porte qui se fermait à tout changement possible, à cause de la réaction pavlovienne de quelques décervelés qui croient que troller et injurier, c’est persuader ! » Non, certes, et il faut laisser glisser l’agacement voire le dégout, pour s’en tenir à l’essentiel. « Quand le doigt montre la Lune, l’imbécile regarde le doigt. »

Sauf que cet agacement, je le retrouve parfois chez celles et ceux avec qui je discute et milite sur le terrain, à Villejuif, dans le PCF, dans le Parti de Gauche, dans le Gauche Citoyenne. Elles et eux aussi sont choqués par un vrai problème de style de gouvernance de JL Mélenchon, qui se reflète dans le style de ses partisans.

Ce style est parfois désigné par « populisme », c’est un des mille sens du mot : l’idée d’un lien direct entre lui, le leader, et le Peuple, sans corps intermédiaires, sans lieux de débats et d’élaboration collective et contradictoire. Dire « le Peuple », c’est déjà considérer qu’il existe, que son unité n’est pas à construire. L’opposer aux règles et aux élites, c’est reprendre le mot d’Audiard « Un imbécile qui marche va plus loin qu’un intellectuel assis », comme si c’était un crime d’étudier, de débattre avant d’agir. Et corrélativement celui qui critique le leader est donc un ennemi du Peuple.

Cette idéologie, paroxysme de la démocratie représentative (mieux vaut dire délégative voire substitutive) comme opposée à la démocratie participative voire directe, est bien sûr exacerbée par le spectacle des hologrammes, alors que des militants de la France insoumise diront à bon droit que leur programme est discuté depuis un an dans de multiples cercles, que JL Mélenchon multiplie les appels à « ne pas scander son nom » et se présente comme un Cincinatus qui s’en ira aussitôt réunie la Constituante, etc.

Sauf qu’on nous a déjà fait le coup, tant de fois. Je ne marche plus.

Ce dernier mot souligne immédiatement le problème d’une certaine parenté avec… E. Macron. Car cette campagne marque d’abord et avant tout la défaite des primaires devant les appareils. Soit le candidat « tient son appareil », l’a conquis bien avant la campagne (comme Marine Le Pen) ou le construit dans le but et à la faveur d’une campagne (comme Mélenchon et Macron), sans rien demander à personne parce qu’il ou elle « est » le Peuple. Soit il est l’émanation d’un long débat de primaire au sein du « peuple de son courant politique » et alors, s’il n’est pas celui qu’aurait choisi l’appareil du Parti, il est balayé.

Vous pouvez, braves gens de droite, du PS ou de l’écologie, vous mobiliser pour enfin vous débarrasser de Sarkozy, Hollande, Valls ou Duflot. Vous pouvez imposer le candidat que vous êtes des millions à souhaiter. S’il n’est pas celui de l’appareil, il est fichu. Car il n’a ni les relais, ni l’argent.

 Loyauté envers Hamon

J’ai participé à ces primaires. Je n’ai pas voté Jadot, mais je me suis senti tenu envers lui. J’ai participé à la primaire ouverte par le PS à ses sympathisants et aux écologistes, j’ai voté Hamon, et je me sens tenu par le résultat, dans la mesure où ce résultat est se révèle compatible avec la loyauté envers Jadot. J’ai voté pour la fusion de ces deux campagnes (pas des deux partis !! ) tout en regrettant qu’elle ait été négociée en dépit du bons sens, comme s’il s’agissait d’abord d’assurer la réélection de C. Duflot et de quelques autres, sans souci d’unifier les 3 candidatures « écolo-compatibles ». Et je me sens tenu par le résultat de ce vote.

La loyauté n’est plus une vertu. Je le regrette, j’en prends acte, j’en ai profondément souffert en 2001, mais pour ma part j’y crois encore. Rétablir la confiance est au cœur du problème dit « crise de la représentation démocratique ».

La démocratie représentative et son outil, les partis, crèvent de bien des choses (en particulier l’internationalisation économique sans internationalisation de la démocratie) mais surtout du cynisme de ces gens qui disent une chose et font aussitôt l’inverse. Hollande a ainsi tué la social-démocratie pour longtemps, aussi longtemps que Guy Mollet.

On peut rompre une loyauté, quand la nécessité historique l’impose avec évidence. Ce n’est pas vraiment le cas, on l’a vu, ni pour Macron ni pour Mélenchon. Ma loyauté ne sauvera pas Hamon ? Peut-être, mais il serait dangereux, sur le long terme, que les débats qui ont conduit à la candidature unifiée Jadot-Hamon soient abandonnés comme une vieille chaussette.

Hamon a tout de suite osé présenter l’esquisse du futur « écosocialisme de gouvernement ». Il a donc aussitôt croisé la route d’Europe Écologie, reprenant tous ses thèmes, y compris la nécessaire extension transnationale de la souveraineté populaire (l’Europe, lui qui na jamais été eurobéat). Il a compris la mutation vers la société cognitive et sa conséquence économique : le découplage progressif entre travail et revenu, donc le revenu universel, et l’économie sociale et solidaire. Il a gagné largement la primaire ouverte socialiste, il a fusionné facilement, sur un excellent accord programmatique, avec la campagne de Jadot, il « pesait » 18 % au départ…

Mais très vite l’appareil l’a tué, réaffirmant les choix, même plus sociaux, du quinquennat de Hollande : le libéral-productivisme de son inspirateur puis ministre de l’économie, E. Macron. Dès lors, le vote en faveur de Hamon s’est effondré , certes parce que, encore un peu… vert, il apparaissait moins « bon » que Mélenchon, mais surtout parce que, dans une campagne qui signe la décomposition de la vieille représentation politique, il n’apparaissait plus comme un pôle reconstructeur, lié qu’il était à un parti qui incarne le bilan du hollandisme, à un parti qui ne le soutient pas, à une alliance (avec EELV) que l’appareil instrumentalise en faveur de Macron, à un contenu (l’Europe et l’Écologie) que ses élus n’osent pas assumer.

Et c’est aussi pour cela, pour cette mise en crise du PS, que je voterai Hamon. Pas seulement la solidarité profonde des « trahis ». Mais parce qu’il est, à la différence de Mélenchon (qui lui aussi devra se poser demain la question de ce qu’il fait avec le Parti de Gauche, Ensemble et le Parti communiste) au cœur de la crise du parti de gouvernement de la période qui s’achève.

Que va devenir le PS dans les années qui viennent ? Deux solutions : ou c’est Hamon qui en est éjecté, et qui crée un PSA, comme Rocard contre Guy Mollet pendant la guerre d’Algérie, qui aura pour vocation de fusionner avec EELV, comme le PSA s’est fondu dans la nouvelle gauche du PSU (sans doute sous forme "coopérative“, mais c’est un autre débat). Soit au contraire ce sont les « plus libéraux que sociaux » qui s’en iront, formant un PSD comme André Santini et les autres quand Mitterrand, s’éloignant de la « 3e voie », s’est rapproché des communistes. Scission libérale qui aura vocation à fusionner avec En marche, comme le PSD s’est fondu dans l’UDF giscardien.

Dans les deux cas, l’écologie a tout à gagner à ce que Hamon fasse le meilleur score possible, en attendant de rouvrir le débat avec les mélenchonistes, le plus tôt possible.




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