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"L’Europe sociale est en retard sur l’Europe de l’environnement"

10 juin 2004 par Alain Lipietz

Député européen depuis 1999, Alain Lipietz conduit la liste francilienne des Verts en vue des élections du 13 juin.

L’Union européenne s’est saisie ces dernières années de nombreuses questions liées à l’environnement, à la protection des consommateurs. Est-ce une victoire des Verts ?

Oui, car les traités le permettaient. Lors de la dernière législature, j’ai été le rapporteur de la directive (la loi) sur la responsabilité environnementale, qui protège beaucoup mieux riverains et consommateurs que la charte que Messieurs Raffarin et Chirac proposent au Parlement français. L’Europe s’est par ailleurs fortement engagée dans la lutte contre le réchauffement climatique. Dès le 1er janvier prochain, les émissions de gaz à effet de serre par la grande industrie seront limitées au sein de l’UE. Enfin la directive OGM que nous avons adoptée permettait de contrôler, "de la fourche à la fourchette", leur introduction dans les assiettes européennes. Nous considérons donc comme un coup de force la décision de la Commission de lever le moratoire. Le groupe Vert a d’ores et déjà préparé un recours devant la cour européenne de justice.

Qu’attendent les Verts du prochain Parlement européen ?

D’abord l’élargissement de ses préoccupations à l’Europe sociale, qui est très en retard. Le fait qu’il n’y ait pas de législation sociale s’appliquant à toute l’Europe encourage les délocalisations vers les pays à basse protection sociale.

Adhérez-vous au discours du PS sur l’Europe sociale ?

Disons que c’est plutôt le PS qui adhére au nôtre puisqu’il reprend le programme que nous défendons depuis 1989, alors que lui a voté les traités de Maastricht et Nice qui s’y opposent ! Le problème, c’est que le PS français n’est pas en accord avec ce que disent les socialises anglais de Tony Blair, ou les socilaistes allemands de Gerhard Schroder. Seuls notre Parti Vert Européen défend ce programme de la Laponie à l’Ile de Malte. Sur dix ans, nous souhaitons que le SMIC, la durée de travail, la législation sociale soient la même d’un bout à l’autre de l’Europe.

Quelles doivent être les priorités du futur ministre des Affaires étrangères européennes ?

Il devra affirmer l’indépendance de l’Europe et prendre des initiatives pour la paix entre Israël et Palestine. L’Europe ne doit pas se poser en grande puissance rivale des Etats-Unis. Nous ne partageons pas leur logique du "plus fort". L’Europe, qui a su depuis cinquante ans surmonter toutes les tensions, me paraît être le laboratoire d’un accord politique mondial négocié.

Quelle Europe imaginez-vous dans cinquante ans ?

Dans cinquante ans, l’Union comprendra tous les pays qui partagent son espace économique et ses valeurs, y compris les Balkans et la Turquie. Elle aura aussi des liens très étroits avec les pays de la Méditerranée et la Russie . Elle sera enfin une fédération laissant beaucoup d’initiative à ses régions et où France conservera toute une série de prérogatives comme la défense de sa langue et de sa culture , la solidarité sociale (santé, retraite), tout ce qui relève aussi de la justice et de la police locale.

Propos recueillis par Jérôme Vermelin



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