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« Du cosmétique pour l’emploi »

18 janvier 2012 par Alain Lipietz

Alain Lipietz est ancien député européen d’Europe-Ecologie Les Verts. Il revient, pour Libération.fr, sur le sommet social qui s’est tenu ce matin, à l’Elysée. Entretien avec Christian Losson.

« Du cosmétique pour l’emploi »

Quel bilan tirez-vous des mesures d’urgence décidées lors sommet sur l’emploi ?

C’est une annonce strictement conjoncturelle, qui vise à faciliter... la vie des chômeurs. La meilleure mesure, celle relative aux 100 millions d’euros alloués pour lutter contre le chômage partiel, permet d’éviter au moins une chose : la perte de savoir-faire. Mais cela ne répond pas aux problèmes que rencontrent déjà les intérimaires, les CDD et les intermittents....

... Mais 430 millions d’euros injectés, c’est presque dix fois moins que le financement des heures supplémentaires défiscalisées, que le gouvernement ne veut pas toucher ?

Un tel montant s’avère en effet anecdotique. Et la logique est troublante : pourquoi s’occuper du travail partiel quand, dans le même temps, on continue à accumuler les ambiguïtés et à financer les heures sup’, qui sont une incitation à la non-création d’emploi. Pourquoi accompagner, de fait, la réduction du temps de travail et militer pour l’augmentation du temps de travail du coté de la retraite et la suppression des 35 heures ? C’est toute l’ambiguïté du gouvernement : faire du cosmétique pour l’emploi tout en s’arc-boutant sur le « travailler plus pour gagner plus » .

Quelles solutions concrètes proposez-vous pour limiter la casse sociale liée à la crise ?

D’abord, revenir sur cette politique d’allongement de la duree du travail ! Ensuite, avoir une réelle politique en direction du secteur public et de l’économie sociale et solidaire, notamment avec l’arrêt de la suppression d’un poste sur deux dans la fonction publique qui provoque l’agonie de certains secteurs, comme la santé. Ensuite, il faut évidemment réussir un green new deal, l’arme la plus puissante et la plus stratégique. Si l’on parvient à faire baisser les gaz à effet de serre de 40% d’ici 2020, ce ne sont pas moins de 650 000 emplois qui peuvent être créés (en incluant les emplois liés aux économies d’énergie dans le logement). Enfin, il faut une modification profonde de l’idéologie française de la création d’emplois qui passe par des aides aux PME. Pour éviter que les entreprises les plus en difficultés ne tombent en faillite. Et pour les pousser à monter en gamme. Or, le gouvernement n’emprunte pas la voie de la réorientation de notre appareil de production...

La TVA antidélocalisation ou sociale vous semble-t-elle une idée viable ?

Historiquement, dans les années 90, les Verts y ont été favorables. Elle a deux effets : faire cotiser toute la valeur ajoutée et pas les seuls salaires et, ensuite, réduire les prix à l’export et les augmenter à l’import. Pour le premier objectif, la CSG, c’est mieux. Pour que le second effet soit utile, il faudrait d’abord reconstruire une capacité de production française ! Mais, telle qu’elle est proposée aujourd’hui, la TVA sociale ne peut satisfaire que les patrons, qui vont voir leurs charges sociales allégées.

Ici l’interview sur liberation.fr, avec intéressants commentaires !



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