C6R. Ecole Rampal. Législatives
par Alain Lipietz

lundi 2 avril 2007

Après une semaine en Bolivie et une autre à Bruxelles, j’atterris enfin en France. C’est compliqué : je dois vous raconter en même temps ma semaine bolivienne (voir mes feuillets de blog sur Sucre et Santa Cruz et sur La Paz, avec un petit crochet par Buenos Aires), nos espoirs déçus et le résultat de l’appel SNCF, et les votes de Bruxelles. Bon, me revoilà aux miens, et à la politique française.

C6R

Samedi, je remplace Dominique à la Convention pour la 6e République. Ils ont changé le lieu au dernier moment, je l’apprends sur place et, arrivé au bon endroit, il n’y a pas grand monde… On m’explique qu’une conseillère régionale verte, Francine Bavay, avait promis l’hémicycle du Conseil régional francilien, mais qu’on s’étaient aperçu qu’elle n’était pas très fiable. Je leur avoue que nous faisions le même constat.

Dommage. La crise de la représentation politique en France est devenue terrible. J’explique qu’elle a deux racines bien distinctes, sur lesquelles les Verts ont des réponses. Première raison, les gens ne se sentent pas représentés par la « classe politique ». Deuxième raison, ces élus ne peuvent pas faire ce pour quoi ils ont prétendu se faire élire.

Face à la première raison, il faut évidemment développer la démocratie directe et participative, limiter strictement le cumul des mandats, y compris dans le temps, accorder le droit de vote aux immigrés résidents, renforcer la loi de parité et surtout établir une correction proportionnelle. Il est aberrant que les électeurs écologistes puissent peser de façon décisive sur les niveaux où existe la représentation proportionnelle (municipales, régionales, européennes) et pas sur les départements ni sur l’espace national, simplement pour des questions de calcul tactique dans les scrutins majoritaires.

Mais le mal est plus profond. Il réside dans l’inadéquation des espaces politiques français à la réalité de la vie matérielle. Aujourd’hui, 80% du travail humain que l’on consomme dans sa vie est produit dans un rayon de 20 km autour de chez soi. Les 20% restants peuvent l’être quasiment dans le monde entier, et le sont en fait à 90 % dans l’Europe élargie. Un entrepreneur de Bordeaux et ses salariés ne sont pas plus en concurrence avec un entrepreneur de Strasbourg qu’avec une entreprise de Porto ou de Bucarest, et même plutôt moins ! Les règles (écologiques, sociales, fiscales) devraient donc être harmonisées dans l’espace européen, faute de quoi la concurrence détruit les conquêtes démocratiques. Et je critique très durement (Montebourg étant à la tribune) ceux qui ont refusé le pas en avant considérable que représentait le TCE par rapport à l’accord de Maastricht, dans la possibilité de construire des règles communes grâce à une Europe fédérale.

Quant au 80% de l’activité locale, sa régulation démocratique demande aussi un sérieux réaménagement. On ne comprend plus rien au rôle exact des départements ; quant aux communautés d’agglomération et de « pays », ce sont des bonnes structures mais on n’élit pas leur direction ! Donc, une partie importante de la vie municipale (services publics, investissements) relève de la diplomatie entre les maires et non pas du choix des citoyens.

Les Verts sont donc à la fois pour une démocratisation profonde de l’Union européenne (au moins les « acquis » du TCE), et pour un renforcement de la démocratie locale : supprimer les départements au profit de la région, et élection au suffrage universel direct des conseils de communautés d’agglo et de pays.

Rue Rampal

Dimanche, anniversaire de mon petit-fils Gabriel et de ma nièce Hayet. Gabriel va à l’école communale près de la maternelle de la rue Rampal, dans le 19e. Ses parents me racontent comment les écoles du coin (parents, enfants et instits) se sont instantanément mobilisées lors des incidents qui ont vu l’incarcération de la directrice protestant contre l’arrestation d’un grand père chinois sans papier qui attendait à la sortie de la maternelle. Ils me racontent avec admiration comment les parents « blancs » se couchaient devant la voiture de police qui embarquait le grand-père chinois. Allons, tout n’est pas perdu dans notre beau pays…

Je pense quand même à ce chef de cabinet et à ce directeur de la police parisienne qui m’avaient juré avec des trémolos qu’ils n’organiseraient aucune chasse aux sans-papiers aux abords des écoles et avaient encouragé les sans-papiers présents à l’entrevue à surtout continuer d’emmener leur enfants à l’école, car « la scolarisation, c’est le plus important ». On appelle ça une félonie.

Autre gossip familial : Thomas Tully, jeune docteur en écologie, spécialiste des déterminants environnementaux de l’évolution et très proche de la famille (et sympathisant vert) fait la Une de La Recherche de mars par un article sur la sélection naturelle et le vieillissement. Il semble que la Nature préfère consacrer l’énergie à la reproduction plutôt qu’à la maintenance des vieilles carcasses. Mais, note-t-il en conclusion, comme c’est une propriété de la physiologie et non du comportement individuel, il serait bête de pratiquer l’abstinence pour tenter de vieillir moins vite…

Les soir, anniversaire des deux petites filles de Francine, Rym et Leila (oui, on est des familles très « deux rives de la Méditerranée »). On regarde en rigolant le bêtisier politique de 2007. Je vous conseille tout particulièrement le 10e commandement : « Tu garderas ton flegme (si possible) »

Législatives

Lundi, présentation à la presse des candidat-e-s du 94… dont la secrétaire nationale Cécile Duflot qui se présente chez elle, à Villeneuve Saint-Georges. Petite discussion avec les journalistes sur la réalité de l’accord avec le PS. Nous rappelons encore une fois qu’il n’y a pas (encore ?) d’accord avec le PS, et que celui-ci nous a donné rendez-vous au lendemain du premier tour. Nous insistons sur le fait que c’est la première fois qu’ils nous font un truc pareil. Des contacts avaient été établis avec Mitterrand, sur Plogoff et le Larzac, 50 réunions de préparation d’un programme commun de majorité plurielle avaient eu lieu avant la victoire de Jospin. Là, manifestement, les désaccords sont tellement forts au sein du PS, et entre celui-ci et leur candidate, qu’ils préfèrent attendre de voir combien elle « fera » avant de nous proposer quoi que ce soit…

Ils ont tort. Même s’ils pensent que le « moment Bayrou » est passé (parce que Bayrou n’a pu exhiber de majorité parlementaire), eux non plus n’ont pas de majorité parlementaire, et comme les deux élections sont dorénavant couplées, le PS ne peut plus gagner l’élection présidentielle, à moins d’être en mesure d’annoncer, et dès avant le premier tour, un accord avec nous. Hollande l’a compris et annonce cet accord… sauf que c’est faux !

Hélène Pecolo et moi, candidats sur la 11è du Val de Marne (Villejuif, Arcueil, Cachan, Gentilly Ouest)


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