Dans les interstices que me laissent les soins qu’exigent la douloureuse convalescence de Francine, j’essaie encore vaguement de faire mon boulot de Député européen. Je le fais sur mon blog, très riche en liens hypertextes. Puis, conscient des devoirs d’un élu, non seulement envers ses électeurs, mais aussi envers les militants qui l’ont fait élire, je renvoie ces textes sur des listes internet des Vert-e-s et de leurs commissions compétentes. Mon dernier billet, du Dimanche 23 juillet 2006 « Jennar jette le masque. Bettelheim est mort », a provoqué un débat assez intense qui m’a profondément surpris par sa violence.
Premièrement, sur la forme.
Près d’une dizaine de messages consistent tout simplement à rechercher où se trouve le texte de Jennar que je commente, et ce qu’il dit exactement. Pourtant, chacun de mes billets envoyés sur les listes est précédé de l’en-tête « Pour bénéficier des liens hypertextes, lire ce texte sur mon blog » et je donne la référence exacte. Il n’y a qu’à cliquer dessus, on se retrouve sur mon blog et là on clique à nouveau sur le passage qui évoque l’article de Jennar et on arrive aussitôt sur l’article en question.
Pourquoi n’y a-t-il pas directement les liens hypertextes dans mes messages sur les listes ? Parce que cela a été convenu depuis longtemps par les usagers des listes. Sinon le poids de chaque message serait énorme. Mes textes sont envoyés sur les listes complètement dépouillés de leur mise en forme, donc sans lien hypertexte.
Mais je me rends compte plus profondément que certains ignorent ce qu’est un hypertexte ! Sur un site et surtout sur un blog, vous pouvez repérer, dans les textes, des passages soit soulignés soit (dans mon cas) en gras. Vous passez la flèche dessus, elle devient une petite main, vous cliquez et vous voyez apparaître un autre texte auquel les mots du mien font référence. C’est ça qu’on appelle un lien hypertexte. La maitrise de cette technique vraiment élémentaire pour les usagers d’internet éviterait peut-être un quart des messages qui circulent sur les listes vertes.
Deuxièmement, sur le fond.
Ce billet de mon blog portait sur une déclaration importante, engageant la politique européenne des années à venir, plus particulièrement sur l’année 2009, et non sans effet sur la prochaine présidentielle en France. Or beaucoup de réponses furibardes des listes vertes nous renvoyaient vers le passé : au 29 mai 2005.
De quoi s’agissait-il ? D’un article publié dans L’Humanité, du collaborateur de la GUE (groupe communiste au Parlement européen) chargé des questions constitutionnelles, Marc-Raoul Jennar. Il s’opposait à ce que le prochain Parlement européen, élu en 2009, ou d’ailleurs toute assemblée élue de la même façon, à la proportionnelle, ait compétence pour rédiger une nouvelle constitution.
De la part de l’éminent noniste que fut Jennar, cela n’a rien d’étonnant : une des grandes avancées du TCE était justement de donner au Parlement européen le droit d’initiative constitutionnelle, et les communistes s’y étaient opposés. La nouveauté du texte de Jennar, et ce pourquoi je lui avais consacré un blog, c’est qu’une partie des « Non » de gauche avait laissé entendre qu’ils étaient, eux, favorables à une Constituante élue, par exemple le futur Parlement européen. L’article de Jennar publiée dans L’Humanité signifiait tout simplement que dorénavant les Communistes s’opposeraient à cette stratégie pour parvenir à un nouveau traité (et s’en tiendraient donc à Maastricht-Nice.)
Il ne s’agit donc pas d’une bataille d’arrière-garde à propos de 2005, mais d’une anticipation des problèmes de 2009. Il est probable que la façon de sortir de Maastricht-Nice sera également un des aspects de la campagne de 2007 : le texte de Jennar va probablement servir également de base à celui des candidats que soutiendra le Parti communiste, que ce soit José Bové ou Marie-Georges Buffet.
En quoi cela concerne-t-il les Verts ? Tout simplement en ceci que les Verts étaient arrivés progressivement au long des treize dernières années à une quasi unanimité dans l’hostilité à Maastricht et à Nice. Je rappelle que cette opposition avait commencé chez les plus conscients des Verts, dont Dominique Voynet, par une opposition à l’Acte Unique de 1988 (on trouvera toute cette histoire sur mon site, mais là, vous n’avez qu’à utiliser le Google interne en haut à gauche ). Et si les Verts s’étaient divisés sur Maastricht (sans compter ceux qui étaient alors au PS ou à Génération Ecologie et avaient voté Oui comme leur parti d’alors), tous les députés verts (européens ou nationaux) avaient voté non à Nice. J’avais pu constater, pendant la longue campagne du TCE, que la plupart des critiques émises par les gens portaient justement sur ces aspects de l’Acte Unique et des traités de Maastricht, Amsterdam et de Nice qui n’étaient pas amendés par le TCE.
Le choix de Jennar, et surtout la publicité que lui donne l’Humanité, est donc d’une extrême importance : nous ne pouvons plus compter sur des alliés de ce côté pour sortir de Maastricht-Nice. Il faut en tenir compte, ajuster notre tactique, notre stratégie, notre discours. C’est le
B-A BA de la politique.
Troisième aspect des choses : les réactions sur les listes vertes. Passons sur quelques réactions (peu ! on les compte sur les doigts, même pas de pieds !) qui s’en tiennent à l’injure et à l’invective, genre « Les partisans du Oui au TCE ne sont que de méprisables libéraux. » Ces mails lapidaires, injurieux et non argumentés (ceux des Dacheux, Guibert, Tagliaferri, et compagnie) qui semblent davantage bêtes que méchants se retranchent d’eux-mêmes de « l’éthique de l’agir communicationnel ». Le candidat à la présidence de la commission Europe des Verts, Pierre Minnaert, va jusqu’à demander de m’interdire la liste de débat de cette commission !
En revanche, quelques mails, quelquefois assez longs, cherchent à argumenter. Je les respecte tout à fait. Mais, pour les raisons que j’ai dites au début de ce texte, il m’est actuellement impossible de leur répondre. Pour faciliter le débat, je propose de voir jusqu’où nous sommes encore d’accord sur un certain nombre de points , que j’exposerai, comme aurait dit Bettelheim (ou plutot Althusser) de façon didactique et dogmatique : sous forme de thèses, suivies de courts commentaires.
Thèse I : les lois , et les constitutions et traités fixant les règles prédéterminant les lois susceptibles d’être adoptées, ont une importance pour la réalité sociale et l’écologie.
Commentaire : cette thèse est reconnue par presque tout le monde. Au sein de l’écologie, il appartient plus spécialement aux Verts de s’occuper de changer lois et traités. C’est ce qui nous distingue des mouvements associatifs, qui mènent essentiellement des luttes de terrain. Mais les lois pour lesquelles nous nous battons sont co-élaborées le plus souvent avec ces associations. Elles leur servent d’outils pour leurs propres luttes. Quant aux traités et constitutions, ils délimitent ce qu’on a le droit de voter et qui le vote, et donc prédéterminent d’une certaine façon leur résultat. Par exemple, on observera sur mes dix derniers blogs que l’essentiel de mon travail, de celui de la gauche et des Verts, depuis quelques mois au PE, a consisté à essayer de réintroduire l’article 122 du TCE, faisant obligation aux Etats de financer les services publics, et le précisant par une loi spéciale : point que nous aurions pu avoir d’emblée en votant le TCE. Dans cette bataille, étroitement liée à celle de la directive Services « Bolkestein » (qui, suite au Non, a récupéré les services publics dans son champ), nous coopérons étroitement avec les syndicats européens.
Thèse II : Voter Non au TCE, c’était choisir pour un certain temps de s’en tenir à Maastricht-Nice.
Cette thèse est si évidente juridiquement et pratiquement qu’elle ne nécessite pas de commentaire. Quand on répond « Non » à la question « autorisez-vous le gouvernement à ratifier le remplacement d’un traité par un autre ? » on choisit ipso facto le traité en vigueur. Cela ne veut pas dire qu’on l’aime ni qu’on aurait aimé son remplaçant (je n’aime pas le Tce) mais c’est toujours une décision tranchant juridiquement pour l’un ou pour l’autre.
L’argutie selon laquelle « Je n’ai pas à me soucier du traité actuel puisque je ne l’ai pas voté » qui m’avait amusé comme une bonne plaisanterie il y a un an, devient lassante et même effarante quand aujourd’hui encore certains semblent la prendre au sérieux. Confidence pour confidence : je n’ai pas non plus voté le Code civil, ni le Code pénal, ni le Code du travail, ni le Code de la Route, je n’étais pas né. Mais dans ma vie militante, il m’est arrivé de me battre, et longtemps, pour modifier ne fût-ce qu’un article du code existant (abolition de la peine de mort, par exemple) tout en continuant à désapprouver fortement beaucoup d’articles inchangés. Pareil pour les directives européennes qui modifient 2 ou 3 articles de directives des années 80.
Thèse III :La quasi-totalité des Verts considère que le TCE est nettement moins libéral que le Traité actuel de Maastricht-Nice.
Commentaire : La reconnaissance de ces avancées figurait dans le texte commun du Collège Exécutif sortant , à la veille du congrès de Reims. La démonstration demanderait peut-être de refaire un peu de travail, et tout d’abord de se mettre d’accord sur ce que signifie « libéralisme ». Un régime est plus libéral qu’un autre quand le pouvoir politique démocratique y est moins puissant, relativement à la liberté d’entreprendre et aux règles de la concurrence. On peut multiplier les exemples où le TCE accordait aux citoyens, aux élus, aux mouvements de citoyens recueillant au moins un million de signatures, une capacité d’influer sur les règles du jeu social, primant les règles de la concurrence. Par ailleurs, les droits des services publics, déjà reconnus par l’article 86 du traité actuel, étaient considérablement renforcés par l’article 122 et placés ouvertement sous la responsabilité des élus.
Dans le débat qui a suivi mon billet sur Jennar, plus personne n’a évoqué les bouffonneries de l’époque (désavouées même par José Bové) selon lesquelles le TCE aurait rétabli la peine de mort, interdit l’avortement, fait interner les malades du Sida, placé une armée européenne sous commandement d’un général américain, reconnu les tribunaux islamiques etc. Une personne a cherché à réaffirmer un point de « recul libéral » : la phrase « l’Union européenne offre un espace où la concurrence est libre et non faussée ». C’est d’ailleurs la phrase encore couramment citée par ceux et celles qui n’assument plus le ridicule des phrases précédentes.
Comme chacun sait, cette phrase aurait remplacé la phrase actuelle (et donc maintenue) « ...où la concurrence est libre et ouverte ».
Comme je l’ai expliqué dans un texte de mon site, l’expression « un espace où la concurrence est libre » signifie qu’il n’est pas compartimenté par des frontières nationales et des barrières douanières. En revanche le mot « ouvert » laissait entendre que tous les coups étaient permis. La Convention a judicieusement remplacé cet adjectif par « non faussée. » Lors d’un dîner avec Gilles Lemaire, Yves Salesse, président de la fondation Copernic, avait lui-même reconnu que, dans le jargon européen, cela signifiait « sans dumping social, fiscal ou écologique ».
Bien entendu, placé tout à fait en tête de la Constitution, un tel présent de l’indicatif n’a pas d’autre valeur qu’une orientation guidant les futures lois, et l’une de mes critiques au TCE était qu’il n’offrait guère aux élus les moyens de réaliser un si beau programme. Mais que les partisans d’une « concurrence faussée » justifient leur position ! Etant bien entendu que ce « non faussée » ne signifie en aucune manière que l’agriculture et les services publics soient subordonnés aux règles de la concurrence , comme il est déjà précisé noir sur blanc dans le traité actuel (et plus clairement encore dans le TCE).
Thèse IV : Le vote pour le non a donc eu pour résultat le choix d’une constitution très libérale contre une constitution moins libérale. Cela ne veut pas dire que ce choix ait été conscient.
Commentaire : Il est clair que pour l’extrême-droite villiériste, et pour les libéraux (Wall Street Journal, Financial Times, Sarkozy, Madellin), ou les sociaux-libéraux (Fabius, les héritiers de Mitterrand), il s’agissait bien de choisir la constitution la plus libérale possible. Par ailleurs, pour les communistes (PCF ou LCR), qui se sont toujours opposés à l’Europe et qui considèrent qu’ils n’ont d’avenir politique que dans le cadre national, le choix de ne pas améliorer l’Europe (équivalent au refus de la taxe de Tobin de la LCR et de LO parce que cela risquait « d’améliorer le capitalisme ») est un choix stratégique « souverainiste » de nature plus politique que réellement économique. Or, l’existence d’un espace politique compartimenté en nations, superposé à un espace économique unifié, signifie l’impossibilité d’imposer des règles politiques à la concurrence et, donc, est pratiquement équivalent au libéralisme. Il ne pourrait en être autrement que si ces partisans du Non avaient en même temps demandé la sortie de l’Union européenne et le rétablissement des barrières douanières.
En ce qui concerne les électeurs, la situation est beaucoup plus nuancée. Une partie importante des électeurs de Le Pen et de Villiers, Chevènement, Buffet est effectivement nationaliste et même national-productiviste.
Toutefois, si les électeurs de ces partis adhéraient aux positions de leurs dirigeants, il est non moins clair qu’une grande partie des électeurs a voté Non pour voter contre Chirac et le MEDEF (c’était le texte de l’affiche du PCF) et une autre partie a voté Non contre l’Europe actuelle (c’est-à-dire l’Europe libérale de Maastricht-Nice), ou Non à son élargissement à des pays à la « mauvaise réputation » tels que la Roumanie ou la Turquie.
Les Verts, après une longue discussion, étaient très largement tombés d’accord pour juger que c’était au contraire l’adoption du TCE qui permettrait le mieux de commencer à réparer les défauts de l’Europe actuelle.
Ceux qui ont voté Non en espérant obtenir une amélioration de l’Europe se sont donc laissés entraîner par un discours venus de dirigeants, de type : « l’Europe de Maastricht-Nice ne pouvant pas continuer à marcher, en cas de Non on trouvera nécessairement un plan B qui proposera une meilleure constitution. »
Thèse V : Il est donc essentiel de ne pas assimiler les électeurs du Non aux dirigeants politiques et intellectuels du Non, qui les ont trompés.
Commentaire : cette thése est presque une banalité, car si les Hfommes font l’Histoire, il ne savent pas l’Histoire qu’ils font, et c’est justement le boulot des partis politiques de chercher à mettre un peu de lumière dans cette histoire. Paraphrasant un de ces « grands hommes » qui m’ont le plus intimidé (tiens , faudra quand même que je raconte cette rencontre sur mon blog), « Si les hommes ne peuvent changer d’avis, à quoi sert le militantisme ? ». Dit autrement : les électeurs de 2009 ne voeroant pas forcément comme les électeurs de 2004.
La plupart des gens (j’en suis), lorsqu’ils ont suivi de mauvais conseillers, sont prêts à l’admettre : « je me suis fait avoir, c’est un peu de ma faute, je ferai plus attention la prochaine fois ». Toutefois certains, sur les listes, réagissent avec indignation à l’idée qu’On aurait pu les rouler, et même avec un certain panache, à la Cyrano : « Dans le mur, peut-être, mais de moi-même ! »
On ne peut malheureusement le leur accorder. Car si l’on peut avoir raison tout seul (Galilée), l’erreur est un phénomène collectif , socialement construit. Cela pour des raisons évoquées par Bourdieu, Pascal et quelques autres. En gros , la réalité est un indice de soi-même (c’est déjà ça, mais bien sûr ça ne suffit pas), alors que l’erreur est une construction sociale, une « communauté de pensée » résultant de jeux d’interprétation et d’autorité. C’est la raison pour laquelle d’ailleurs l’agir communicationnel permet de dissoudre certaines erreurs et d’approcher la réalité.
Thèse VI : Le TCE étant le meilleur compromis possible à 27 dans la conjoncture historique de la Convention, l’hypothèse du plan B était a priori extrêmement risquée, peu crédible et aujourd’hui démentie par les faits.
Commentaire : Pour en connaître les risques, il suffisait d’examiner les élections de 2004, ce que beaucoup de Verts ont fait sur le coup et que Jennar prétend n’avoir fait que deux ans plus tard. Quant au fait qu’aucun plan B n’a émergé, alors que nous sommes à trois mois et demi de la date où aurait dû entrer en vigueur le TCE, il confirme définitivement que le pari sur la dynamique du Non est perdu. On ferra peut-être mieux que le TCE un jour, mais le 2 novembre 2006 le Non apparaîtra « en attendant ce jour » comme un recul.
Thèse VII : Depuis le 29 mai 2005, ce sont les partisans du Oui qui se sont le plus acharnés à trouver une solution permettant de sortir le plus rapidement possible de Maastricht-Nice.
Commentaire. Il suffit de lire mon blog et ses forums pour constater qu’à l’Europe les partisans du Oui ont toujours été à l’initiative de la réintroduction sous forme législative des avancées constitutionnelles du TCE. Parfois, mais très rarement et fugacement, ils ont été appuyés par certains partisans du Non (exemple de la GUE soutenant discrètement le rétablissement de l’article 122 pendant le débat sur la directive Services, mais l’abandonnant à nouveau lors du débat sur le Livre Blanc sur les services publics).
Bien entendu, les OUI de droite, qui avaient accepté le compromis, sont aujourd’hui trop contents d’en être débarrassés et cherchent à faire sauter même certains articles de l’actuel traité qui, à leurs yeux , sont encore trop anti-libéral (exemple de l’article 86).
En ce qui me concerne, j’ai, dès les premiers jours suivant le 29 mai 2005, publié dans Le Monde un article où je me mettais résolument au service des vainqueurs, c’est-à-dire le camp du Non, pour les aider à mettre en œuvre leur plan B. Sans aucun écho. J’ai par la suite, aux Journées d’été de Grenoble 2005, proposé un plan en trois points :
– Essayer de faire voter les textes les plus progressistes possibles de façon à faire sentir au public ce que l’Europe pouvait apporter.
– Amener les « nonistes » et les « ouiouistes » de bonne volonté, parmi ceux qui cherchent tous une nouvelle constitution plus fédéraliste et donc moins libérale, potentiellement plus sociale et écologiste, à écrire en commun ce qu’ils tenaient à garder et ce qu’ils tenaient à modifier dans le TCE.
– Sur la base de ce consensus susceptible d’être majoritaire dans les différents pays, se battre pour que le Parlement européen, élu en 2009, se proclame constituant.
J’insiste sur le fait que ce dernier point constituera un véritable coup de force, équivalant à la séance du Jeu de Paume. Le TCE prévoyait en effet ce rôle constituant du Parlement, mais justement, il a été rejeté, et Maastricht-Nice ne le prévoit absolument pas.
Aux Journées d’été et lors des CNIRs suivants , ce schéma de stratégie a semblé recueillir l’assentiment des Verts. Toutefois, la direction des Verts n’a guère pris d’initiative en ce sens. J’ai tenté de relancer le deuxième point par l’intermédiaire de Politis, mais à mon article n’a été répondu qu’une volée de bois vert. Cette réaction est compréhensible. Politis a pris parti pour Nikonoff dans la bataille interne d’ATTAC ; le rédacteur en chef de Politis n’y est pas majoritaire, et lorsque je lui ai demandé d’ouvrir un dossier sur les problèmes ouverts par le procès Georges Lipietz contre l’Etat et la SNCF, il m’a répondu très honnêtement que ce n’était pas le moment vu les difficultés qu’il avait avec le courant Nikonoff. En outre, le choix de Politis de s’engager derrière un candidat Bové, non pas comme candidat de l’écologie politique mais comme candidat du 29 mai, rendait ce support médiatique impropre à ce genre de débat clarificateur plutôt qu’identitaire.
Conscients du coup de force que représenterait l’auto-proclamation du PE de 2009 comme constituant (ou la convocation d’une convention contre l’avis du Conseil), les Verts européens ont essayé d’associer les parlements nationaux à la manœuvre : ce fut le rapport Duff-Voggenhubber. Il s’est heurté à la convergence d’oppositions complexes. Il semble qu’une vaste majorité de la classe politique européenne soit pour maintenir Maastricht-Nice.
Thèse VIII. La prise de position de Jennar (exprimant probablement celle des Communistes) rend encore plus difficile la réalisation d’un scénario de sortie de Maastricht-Nice, mais en même temps elle est porteuse de clarification.
Commentaire . Je demeure en effet persuadé qu’il suffirait de déplacer les quelques 10 à 20 % de « nonistes » de gauche européens fédéralistes pour obtenir en France un bloc majoritaire en faveur de la sortie de Maastricht-Nice. Non pas vers une « constitution rêvée », comme les Verts et moi-même en re-pondons avec constance et lassitude à chaque élection, mais vers une constitution présentant en gros les avancées du TCE , plus certaines clarifications, votable par la quasi unanimité des pays d’Europe(à l’exception sans doute de la Grande-Bretagne, trop libérale, et de la Pologne, trop résolue à mettre Dieu dans la constitution).
Dans la bataille que vont avoir à mener les Verts à la présidentielle, entre Ségolène Royal, euro-béate qui avait prôné le oui à Maastricht et à Nice, et le « candidat du 29 mai » qui de fait aura choisi d’en rester à Maastricht-Nice un certain temps, et même un très long temps s’il suit la ligne Jennar, les Verts ont ici un atout qu’il faudra savoir exploiter. Dominique Voynet, euro-exigeante qui avait dit non et non à Maastricht et à Nice, et oui au changement, pourra présenter un scénario concret de sortie de Maastricht-Nice, autour duquel les autres devront se déterminer.