Voter Non, une erreur pour des féministes !

4 mai 2005 par Francine Comte Ségeste

De nombreuses féministes s’apprêtent à voter NON au referendum. C’est leur droit d’exprimer ainsi leur ras l’bol, comme va le faire - à quelques % près en plus ou en moins - la moitié de l’électorat. Les Non de gauche imputent à l’Europe la responsabilité des effets du néo-libéralisme qui règne partout, même quand notre propre gouvernement est le plus acharné dans cette orientation. Ce n’est pas ma démarche : si je choisis le Oui, c’est que je pense que l’on pourra se servir du TCE pour avancer.

Mais soit. Je comprends qu’on réagisse par un refus, tant la situation générale est révoltante, inquiétante. Mais qu’on ne fasse pas dire à un texte ce qu’il ne dit pas. Que le tract « La constitution européenne : un piège pour les femmes ! », de plusieurs organisations féministes, s’appuie sur des inexactitudes, ce n’est pas correct.

Nous voulions certes une constitution meilleure ! Et on s’est battu pour. On pouvait même rêver d’une constitution idéale... mais encore faudrait-il que l’idéal soit très largement partagé ! Un « traité établissant une constitution » pour 25 pays, dont 12 nouveaux, ayant déjà une longue histoire (ce qui n’était pas le cas des Etats Unis) ne peut établir d’en haut des règles strictes qui contreviendraient fortement à celles que s’appliquent ces pays. Nous ne sommes pas encore une vraie fédération !! Et, même aux USA, par exemple, la peine de mort est encore autorisée dans certains Etats, ou le divorce interdit dans d’autres. Il y a, sans doute pour encore des décennies, un champ de compétences qui échappe à l’Union européenne et reste du ressort des Etats, à leur demande expresse.

Ceci est particulièrement le cas dans le domaine privé - où déjà les Etats nationaux sont très prudents pour interférer !- et où existent des réticences fortes, où le droit de veto subsiste. D’ailleurs, en France, comme partout, ces droits sont de nature législative, pas constitutionnelle. Le droit à l’IVG aurait-il pu être imposé à l’Irlande ou au Portugal ? Ne vaut-il pas mieux qu’il soit conquis par la mobilisation populaire, facilitée par un rapprochement culturel progressif ? De même pour le droit au divorce : Malte a fait jouer son veto. C’est une bataille pied à pied que nous devons mener, nous les féministes, pour faire basculer l’opinion dans ces pays ! Déjà on a pu échapper de justesse à la mention de Dieu dans la Constitution, que demandent mordicus la Pologne et la Tchéquie ! Et qui les amènera peut-être à voter Non.

Il y a un énorme travail culturel et idéologique à mener, en même temps que politique. Et l’erreur a été de le délaisser en ne construisant, à travers les traités de Maastricht, Amsterdam et Nice, qu’une Europe économique et libérale... Et, en ce qui concerne l’économie, la Constitution, tout en se proclamant libérale (ça se saurait si nous étions sortis du libéralisme !), précise « économie sociale de marché » et esquisse un avancée sur le plan de la régulation de l’économie par le politique. Mais il reste beaucoup à gagner !! Par nos luttes, sur le terrain (dans l’ensemble des pays de l’UE), et au sein du Parlement européen élu.

 Le Chapeau du tract

La Constitution aggrave les politiques libérales ?

La partie III ne fait que reprendre les traités antérieurs, toujours en vigueur (et qui resteront en vigueur si la constitution est rejetée), mais elle ne les aggrave pas. Dans la formulation des lois qui en découlent, elle étend considérablement le champ des votes à la majorité et non plus à l’unanimité : dorénavant près de 95% des articles seront révisables à la majorité, ce qui est plutôt un progrès de la démocratie, encore insuffisant, c’est vrai, mais qui permet une interprétation progressiste... si la majorité du Parlement européen est de gauche et écolo ! Le Parlement se prononcera sur la PAC et sur tout le budget (malheureusement pas sur la fiscalité !). C’est vrai que cette Partie III n’aurait pas dû être intégrée, mais figurer en annexe (et non pas supprimée car elle comprend des avancées sur les traités antérieurs). Nous n’avons pu l’obtenir. Ce sera une bataille à mener que de la détacher de la constitution.

L’égalité entre les femmes et les hommes

Comment peut-on affirmer qu’elle ne figure pas dans les valeurs de l’Union ?

PARTIE 1

TITRE I - DEFINITION ET OBJECTIFS DE L’UNION

ARTICLE I-2

Les valeurs de l’Union

L’Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’Etat de droit, ainsi que de respect des droits de l’homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités. Ces valeurs sont communes aux Etats membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité et l’égalité entre les femmes et les hommes.

L’égalité entre les femmes et les hommes est aussi un des objectifs de l’UE :

 PARTIE 1

TITRE I - DEFINITION ET OBJECTIFS DE L’UNION

ARTICLE I-3

Les objectifs de l’UnionElle combat l’exclusion sociale et les discriminations, et promeut la justice et la protection sociales, l’égalité entre les femmes et les hommes, la solidarité entre les générations et la protection des droits de l’enfant.

Il est normal que la constitution ne définisse pas de « politique concrète » pour cet objectif affirmé : cela relève du domaine des lois européennes. (D’ailleurs les mêmes reprochent l’adjonction de la partie III sur les politiques de l’Union et voudraient que la constitution décline des « politiques concrètes » concernant l’égalité !) Cependant peut-on ignorer que l’UE est plus en avance que la France pour la promotion de l’égalité femmes/hommes ?!

Et, pour que ce objectif ne reste pas un vœu pieux, il est précisé, au tout début de la partie III, que cet objectif doit être appliqué à toutes les politiques de la partie III :

PARTIE III : LES POLITIQUES ET LE FONCTIONNEMENT DE L’UNION

TITRE I - DISPOSITIONS D’APPLICATION GENERALE

ARTICLE III-116

Pour toutes les actions visées à la présente partie, l’Union cherche à éliminer les inégalités , et à promouvoir l’égalité, entre les femmes et les hommes.

Les critiques sur les droits fondamentaux et l’égalité

Les droits concernant l’IVG et la contraception

Ils ne relèvent pas de la compétence de l’UE, et a fortiori de la constitution européenne (d’ailleurs ils ne figurent pas dans la constitution française ! et l’avortement vient juste d’être retiré de notre Code pénal), mais de chaque peuple ou nation, et du domaine législatif. Il est absurde de dire que le « droit à la vie » signifie la porte ouverte à l’interdiction de l’avortement. Toute notre bataille a toujours été sur le thème « l’embryon n’est pas une personne » !! Et nous continuerons à la mener !

 concernant l’orientation sexuelle

Aucune discrimination à ce sujet n’est tolérée :

PARTIE II : LA CHARTE DES DROITS FONDAMENTAUX DE L’UNION

TITRE III - EGALITE

 ARTICLE II-81

Non-discrimination

1. Est interdite toute discrimination fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, les origines ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la langue, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute autre opinion, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle.

PARTIE III : LES POLITIQUES ET LE FONCTIONNEMENT DE L’UNION

TITRE I - DISPOSITIONS D’APPLICATION GENERALE

ARTICLE III-118

Dans la définition et la mise en oeuvre des politiques et actions visées à la présente partie, l’Union cherche à combattre toute discrimination fondée sur le sexe, la race ou l’origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle.

PARTIE III : LES POLITIQUES ET LE FONCTIONNEMENT DE L’UNION

TITRE II - NON-DISCRIMINATION ET CITOYENNETE

ARTICLE III-124

1. Sans préjudice des autres dispositions de la Constitution et dans les limites des compétences que celle-ci attribue à l’Union, une loi ou loi-cadre européenne du Conseil peut établir les mesures nécessaires pour combattre toute discrimination fondée sur le sexe, la race ou l’origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle. Le Conseil statue à l’unanimité, après approbation du Parlement européen.

3) Le « dialogue » avec les Eglises, comme avec les organisations philosophiques, n’est pas nouveau. Tous les états dialoguent avec elles. Ce qui ne veut pas dire suivre leurs recommandations ! La laïcité, dans de nombreux pays, consiste à mettre sur le même plan les Eglises et les associations athées. La séparation de l’Eglise et de l’Etat n’est pas une règle dans de nombreux pays de l’UE et ne peut être imposée brusquement. Même en France, au ministère de l’intérieur existe une « direction des cultes » !

PARTIE 1

TITRE VI - LA VIE DEMOCRATIQUE DE L’UNION

ARTICLE I-52

Statut des églises et des organisations non confessionnelles

1. L’Union respecte et ne préjuge pas du statut dont bénéficient, en vertu du droit national, les églises et les associations ou communautés religieuses dans les Etats membres.

2. L’Union respecte également le statut dont bénéficient, en vertu du droit national, les organisations philosophiques et non confessionnelles.

3. Reconnaissant leur identité et leur contribution spécifique, l’Union maintient un dialogue ouvert, transparent et régulier avec ces églises et organisations.

 Le droit au divorce

Il ne relève pas de la compétence de l’UE mais de chaque peuple ou nation. En outre, il est de nature législative . Quant au droit de se marier, il est distingué du droit à fonder une famille ; ce qui laisse ouverte la question du mariage, ou du PACS, entre homosexuels ou lesbiennes : chaque pays peut légiférer sur la question.

 les violences à l’encontre des femmes

Oui, malheureusement rien n’est spécifiquement dit les concernant (sauf dans la Déclaration sur l’article III-116, annexée à la Constitution) ! Pas plus que dans la constitution française ou celles des autres pays... Mais l’UE est en avance dans cette bataille sur la plupart des nations européennes (à part l’Espagne avec sa loi-cadre) et a édicté toute une série de dispositions sur lesquelles on peut s’appuyer.

Un des tout premiers articles de la Charte des droits fondamentaux concerne le droit à l’intégrité physique et morale, et peut aussi servir d’appui au combat contre les violences faites aux femmes.

PARTIE II : LA CHARTE DES DROITS FONDAMENTAUX DE L’UNION

TITRE I - DIGNITE

ARTICLE II-63

Droit à l’intégrité de la personne

1. Toute personne a droit à son intégrité physique et mentale.

 le « statut autonome » des femmes immigrées

Malheureusement encore, rien n’est dit sur ce sujet. Ni le droit d’asile pour les motifs de violences subies par les femmes. Mais qu’a-t-on dans notre constitution française ? et dans nos lois ?

Concernant le droit d’asile, il est fait référence à la Convention de Genève (?), mais il est dit explicitement que les conditions ouvrant droit à l’asile relèvent non de la constitution, mais de la loi ou de la loi cadre de l’UE. Donc, c’est une loi à faire voter ! Il est sûr que c’est un domaine où il nous faut combattre avec vigueur : la tendance à l’Europe forteresse est une réalité !

7) Concernant le droit au travail

Certes l’expression « droit à » n’existe guère dans le TCE (sauf exceptions : le droit à l’éducation, art. II, 74, à des conditions de travail qui n’altèrent pas la santé, etc). Cette expression « droit à » est absolue, elle implique normalement que l’Etat concerné soit obligé de donner satisfaction : on sait bien qu’il n’en est rien, et que notre droit au travail, comme notre droit au logement, sont purement proclamatoires en France. L’UE est plus pragmatique et refuse d’énoncer un droit sans qu’il puisse être fait un recours contre elle s’il n’est pas appliqué à quelqu’un. Alors bien évidemment on conçoit qu’elle ne peut, par sa constitution, garantir le droit au travail pour tous... Mais elle proclame comme « objectif » le plein emploi (Partie I, art. I, 3, 3), ce qui revient rigoureusement au même : la bataille sera de pousser à la réalisation de cet objectif.

La partie III, issue des traités de rédaction antérieure, est plus prudente : il faut prendre en compte les exigences liées à la promotion d’un niveau d’emploi élevé« (Art. III, 117).

Quant au « droit de travailler », il n’est pas sans portée, surtout tel qu’il est libellé : les tenants du NON ne citent jamais la phrase en entier !!! je la donne :

PARTIE II : LA CHARTE DES DROITS FONDAMENTAUX DE L’UNION

TITRE II - LIBERTES

ARTICLE II-75

Liberté professionnelle et droit de travailler

 Toute personne a le droit de travailler et d’exercer une profession librement choisie ou acceptée.

Cette précision est un obstacle au workfare, a l’obligation faite à un chômeur d’accepter n’importe quel travail. La « liberté de chercher un emploi » ne signifie donc pas devoir accepter n’importe quel boulot précaire.

Concernant le travail des femmes, sans interdire le travail à temps partiel - ce qui serait une bombe économique dans certains pays, et qui relève du domaine législatif - le TCE confirme l’égalité hommes/femmes, et même des mesures « d’action positive » :

 PARTIE II : LA CHARTE DES DROITS FONDAMENTAUX DE L’UNION

TITRE III - EGALITE

ARTICLE II-83

Egalité entre femmes et hommesL’égalité entre les femmes et les hommes doit être assurée dans tous les domaines, y compris en matière d’emploi, de travail et de rémunération.

Le principe de l’égalité n’empêche pas le maintien ou l’adoption de mesures prévoyant des avantages spécifiques en faveur du sexe sous-représenté.

 « Les droits à la sécu, au logement, à un revenu minimum, à une pension de retraite ne sont plus reconnus » ?

Ces droits ne l’ont jamais été au niveau de l’Europe. Au niveau de la France, oui : Mais il est bien écrit que ce qui est reconnu par l’UE comme droit ne supprime pas les droits qu’accordent les états membres dans leur constitution

PARTIE III : LES POLITIQUES ET LE FONCTIONNEMENT DE L’UNION

TITRE III - POLITIQUES ET ACTIONS INTERNES

CHAPITRE III - POLITIQUES DANS D’AUTRES DOMAINES

Section 2 - Politique sociale

ARTICLE III-210

5. Les lois et lois-cadres européennes adoptées en vertu du présent article :

a) ne portent pas atteinte à la faculté reconnue aux Etats membres de définir les principes fondamentaux de leur système de sécurité sociale et ne doivent pas en affecter sensiblement l’équilibre financier ;

b) ne peuvent empêcher un Etat membre de maintenir ou d’établir des mesures de protection plus strictes compatibles avec la Constitution.

Sur le « droit au logement » : voir ce que je dis du droit au travail.

Concernant la Sécu : cela relève des états-membres, mais le TCE affirme d’emblée, au début de la partie III « la garantie d’une protection sociale adéquate » (art. III, 117) . L’UE soutient et complète l’action des Etats, et une loi cadre peut harmoniser progressivement vers le haut, ce qui passe d’abord par l’établissement de seuils minima, révisables progressivement à la hausse, sous réserve de ne pas affecter sensiblement l’équilibre financier (je traite plus loin la question de l’équilibre financier) :

PARTIE III : LES POLITIQUES ET LE FONCTIONNEMENT DE L’UNION

TITRE III - POLITIQUES ET ACTIONS INTERNES

CHAPITRE III - POLITIQUES DANS D’AUTRES DOMAINES

Section 2 - Politique sociale

ARTICLE III-210

1. En vue de réaliser les objectifs visés à l’article III-209, l’Union soutient et complète l’action des Etats membres dans les domaines suivants :

a) l’amélioration, en particulier, du milieu de travail pour protéger la santé et la sécurité des travailleurs ;

b) les conditions de travail ;

c) la sécurité sociale et la protection sociale des travailleurs ;

2. dans les domaines visés au paragraphe 1, points a) à i), la loi-cadre européenne peut établir des prescriptions minimales applicables progressivement, compte tenu des conditions et des réglementations techniques existant dans chacun des Etats membres.

5. Les lois et lois-cadres européennes adoptées en vertu du présent article :

a) ne portent pas atteinte à la faculté reconnue aux Etats membres de définir les principes fondamentaux de leur système de sécurité sociale et ne doivent pas en affecter sensiblement l’équilibre financier ;

PARTIE II : LA CHARTE DES DROITS FONDAMENTAUX DE L’UNION

TITRE IV - SOLIDARITE

ARTICLE II-94

Sécurité sociale et aide sociale

1. l’Union reconnaît et respecte le droit d’accès aux prestations de sécurité sociale et aux services sociaux assurant une protection dans des cas tels que la maternité, la maladie, les accidents du travail, la dépendance ou la vieillesse, ainsi qu’en cas de perte d’emploi, selon les règles établies par le droit de l’Union et les législations et pratiques nationales.

2. Toute personne qui réside et se déplace légalement à l’intérieur de l’Union a droit aux prestations de sécurité sociale et aux avantages sociaux, conformément au droit de l’Union et aux législations et pratiques nationales.

3. Afin de lutter contre l’exclusion sociale et la pauvreté, l’Union reconnaît et respecte le droit à une aide sociale et à une aide au logement destinées à assurer une existence digne à tous ceux qui ne disposent pas de ressources suffisantes, selon les règles établies par le droit de l’Union et les législations et pratiques nationales.

Le point 2 est important : il permet justement de s’opposer à la Directive Bokelstein !!

8) le SMIC et les bas salaires : Ils ne peuvent être décrétés d’emblée à un niveau semblable au nôtre, sauf à produire des catastrophes dans certains pays ! Quant aux pays qui ont un niveau plus élevé, ils ne sont pas désireux de voir leurs droits rabotés. La seule chose possible est le relèvement progressif des seuils. Mais cela relève de la loi (européenne ou nationale), pas d’une constitution. Je vous rappelle qu’en France, l’harmonisation a pris du temps : le salaire mininum garanti était différent d’un département à l’autre jusqu’à l’institution d’un SMIC unique en 1968, par les accords de Grenelle.

9) Les services publics : question de « vocabulaire commun », ils sont appelés « services d’intérêt économique général » (SIEG) : il est bien précisé, ce qui est nouveau, que non seulement l’UE en valide le bien fondé, la valeur, mais que l’UE et les états membres doivent veiller à ce qu’ils puissent fonctionner dans des conditions économiques et financières qui leur permettent d’ accomplir leur mission,

PARTIE II : LA CHARTE DES DROITS FONDAMENTAUX DE L’UNION

TITRE IV - SOLIDARITE

ARTICLE II-96

Accès aux services d’intérêt économique général

L’Union reconnaît et respecte l’accès aux services d’intérêt économique général tel qu’il est prévu par les législations et pratiques nationales, conformément à la Constitution, afin de promouvoir la cohésion sociale et territoriale de l’Union.

PARTIE III : LES POLITIQUES ET LE FONCTIONNEMENT DE L’UNION

TITRE I - DISPOSITIONS D’APPLICATION GENERALE

ARTICLE III-122

Sans préjudice des articles I-5, III-166, III-167 et III-238, et eu égard à la place qu’occupent les services d’intérêt économique général en tant que services auxquels tous dans l’Union attribuent une valeur ainsi qu’au rôle qu’ils jouent dans la promotion de sa cohésion sociale et territoriale, l’Union et les Etats membres, chacun dans les limites de leurs compétences respectives et dans les limites du champ d’application de la Constitution, veillent à ce que ces services fonctionnent sur la base de principes et dans des conditions, notamment économiques et financières, qui leur permettent d’accomplir leurs missions. La loi européenne établit ces principes et fixe ces conditions, sans préjudice de la compétence qu’ont les Etats membres, dans le respect de la Constitution, de fournir, de faire exécuter et de financer ces services.

En France notre secteur « public » (santé, éducation, en particulier) est en concurrence avec des entreprises privées (écoles libres, cliniques, etc), mais surveillées par l’Etat. Il n’est pas remis en cause.

L’exception « culturelle » (c’est-à-dire le droit de veto d’un pays sur les questions culturelles) réclamée et obtenue par la France dans les négociations à l’OMC, est étendue par le TCE au domaine des services sociaux, de la santé et de l’éducation. Article III, 315, 4b.

EdF, SNCF, RATP sont des « SIEG », mais ils vont faire de la concurrence à l’étranger, alors l’UE demande qu’ils soient aussi ouverts à la concurrence du privé ou la concurrence étrangère. Mais le TCE spécifie dans la mesure où l’application de ces dispositions ne fait pas échec à l’accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie.  :

 PARTIE III : LES POLITIQUES ET LE FONCTIONNEMENT DE L’UNION

TITRE III - POLITIQUES ET ACTIONS INTERNESCHAPITRE I - MARCHE INTERIEUR

Section 5 - Règles de concurrence

Sous-section 1 - Les règles applicables aux entreprises

ARTICLE III-166

2) Les entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général ou présentant le caractère d’un monopole fiscal sont soumises aux dispositions de la Constitution, notamment aux règles de concurrence, dans la mesure où l’application de ces dispositions ne fait pas échec à l’accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. Le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l’intérêt de l’Union.

10) Les dépenses publiques et la question de l’équilibre financier

Le tract s’alarme, à juste titre !, des restrictions concernant les dépenses publiques, en particulier dans les services publics. En réalité le TCE demande aux Etats de ne pas creuser de trop le déficit :

PARTIE III : LES POLITIQUES ET LE FONCTIONNEMENT DE L’UNION

TITRE III - POLITIQUES ET ACTIONS INTERNES

CHAPITRE II - POLITIQUE ÉCONOMIQUE ET MONÉTAIRE

Section 1 - La politique économique

 ARTICLE III-184

1. Les Etats membres évitent les déficits publics excessifs.

CHAPITRE III - POLITIQUES DANS D’AUTRES DOMAINES

Section 2 - Politique sociale

ARTICLE III-210

5. Les lois et lois-cadres européennes adoptées en vertu du présent article :

a) ne portent pas atteinte à la faculté reconnue aux Etats membres de définir les principes fondamentaux de leur système de sécurité sociale et ne doivent pas en affecter sensiblement l’équilibre financier ;

Le TCE demande de veiller à l’équilibre financier des pays : cette clause découle du « Pacte de stabilité » (Maastricht !). Il est normal et sain de ne pas trop creuser les déficits ! Si, en France le problème se pose, pour la Sécu comme pour les dépenses sociales, pour l’éducation, etc, c’est surtout une question de répartition des richesses (Chirac qui baisse les impôts de riches !), et une question de choix budgétaires !

Pour nous, les Verts, ce Pacte de stabilité a toujours été dénoncé comme trop rigide : il doit être permis d’avoir un déficit en période de récession, mais alors il faut inverser la vapeur en période plus dynamique. C’est ce qui a fini par être adopté en mars dernier (voir la fin de mon topo).

Enfin : la constitution est-elle impossible à modifier ?

Une constitution est aussi modifiable qu’un traité : la constitution française a été modifiée à moult reprises ! Et le TCE (qui est à moitié traité, à moitié constitution) est aussi modifiable que les traités actuels (le Traité de Nice est par exemple de « durée illimitée »). La règle de l’unanimité est certes requise, mais c’était déjà le cas pour les traités actuels.

Le point 4 de l’article IV-443 institue une nouvelle disposition. Celle-ci reste flou, mais il y a des chances que cela signifie la décision d’appliquer le changement aux 4/5 des pays consentants, et de mettre à l’écart les autres (comme c’était le cas pour l’Angleterre qui a refusé l’euro).

 PARTIE IV : DISPOSITIONS GÉNÉRALES ET FINALES

ARTICLE IV-443

Procédure de révision ordinaire

1. Le gouvernement de tout Etat membre, le Parlement européen ou la Commission peut soumettre au Conseil des projets tendant à la révision du présent traité. Ces projets sont transmis par le Conseil au Conseil européen et notifiés aux parlements nationaux.

2. Si le Conseil européen, après consultation du Parlement européen et de la Commission, adopte à la majorité simple une décision favorable à l’examen des modifications proposées, le président du Conseil européen convoque une Convention composée de représentants des parlements nationaux, des chefs d’Etat ou de gouvernement des Etats membres, du Parlement européen et de la Commission. La Banque centrale européenne est également consultée dans le cas de modifications institutionnelles dans le domaine monétaire. La Convention examine les projets de révision et adopte par consensus une recommandation à une Conférence des représentants des gouvernements des Etats membres telle que prévue au paragraphe 3.

3. Une Conférence des représentants des gouvernements des Etats membres est convoquée par le président du Conseil en vue d’arrêter d’un commun accord les modifications à apporter au présent traité.

Les modifications entrent en vigueur après avoir été ratifiées par tous les Etats membres conformément à leurs règles constitutionnelles respectives.

4. Si à l’issue d’un délai de deux ans à compter de la signature du traité modifiant le présent traité, les quatre cinquièmes des Etats membres ont ratifié ledit traité et qu’un ou plusieurs Etats membres ont rencontré des difficultés pour procéder à ladite ratification, le Conseil européen se saisit de la question.

Par ailleurs, les articles 444 et 445 permettent des procédures de révision simplifiées : le Conseil peut, à l’unanimité des pays, décider qu’il votera à l’avenir à la majorité sur tous les articles de la partie III (à l’exception de la défense où le droit de veto subsisterait). L’unanimité n’est pas si difficile à obtenir, puisqu’en mars dernier, le Conseil, à l’unanimité, a de fait aboli les sanctions portant sur le pacte de stabilité, et donc aboli le pacte lui-même.



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